Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes

La croix de guerre au drapeau des bataillons douaniers

Mis en ligne le 4 mars 2018

Longwy – intérieur de la forteresse – porte de Bourgogne

Participation aux combats de la Grande guerre : la compagnie de forteresse de Longwy en août 1914

 

Au début d’août 1914, la forteresse de Longwy est défendue par deux bataillons, l’un actif, l’autre territorial, une batterie et demie d’artillerie à pied et une demi-compagnie de douaniers. La situation de la place est critique du fait du retrait des troupes de couverture et de la violation par l’ennemi de la neutralité luxembourgeoise.

 

 

 

 

Le lieutenant-colonel Darche est gouverneur de la place. Il est entouré d’un état-major de grande valeur, animé d’un exceptionnel esprit de défense : l’officier du service de santé, Lefèvre, âgé de 78 ans, ne s’est-il pas porté volontaire pour servir à Longwy !

 

 

En août 1792, la place de Longwy (1800 hommes) est investie par une armée de coalition (près de 100 000 prussiens et autrichiens), sous les ordres du duc de Brunswick. En juin 1815, pendant l’épisode des Cent jours, sommé de se rendre, le gouverneur de Longwy, le baron Ducos, mène une magnifique résistance jusqu’au mois de septembre. En janvier 1871, nouveau siège et nouveaux bombardements. Le gouverneur colonel Massaroli n’accepte de se rendre que lorsqu’il ne dispose plus d’hommes valides. En mai 1940, la ville est à nouveau occupée par les Allemands et, comme en 1918, après des années de souffrances et de privations, elle est libérée par les soldats américains.

Les travaux prévus par le plan de défense sont engagés sans retard. Une ligne avancée est installée pour assurer la protection de la forteresse.

Aux abords de la frontière, des avant-postes sont constitués sur un front de vingt kilomètres, essentiellement tenu par des douaniers qui, jusqu’au 20 août, font face aux harcèlements et aux attaques des éléments de la Vème armée du Kronprinz. A deux reprises, alors que l’investissement de la place se resserre, le gouverneur repousse les sommations de se rendre.

Le 21 août, le corps du siège allemand pilonne Longwy sans relâche. L’infanterie s’empare du front nord de la ligne de résistance extérieure, mais le lendemain les attaques d’infanterie cessent. En revanche, les bombardements redoublent de violence.

Le 26, l’artillerie de forteresse est détruite, les bastions sont inutilisables, les abris sont écroulés, l’enceinte présente de nombreuses brèches. La ville est anéantie. Les pertes s’élèvent à cinq cents tués, blessés ou disparus. Les communications sont coupées. La résistance est impossible. Le gouverneur rend alors la place.

 

N’ayant pas voulu se laisser faire prisonniers, une cinquantaine de douaniers, avec leurs lieutenants et suivis par plus de cent cinquante fantassins, réussissent après d’incroyables difficultés à franchir les lignes ennemies et à rejoindre Verdun.

Le 21 septembre 1919, le Président de la République, M. Poincaré, remet solennellement à la ville de Longwy la Croix de Chevalier de la Légion d’Honneur. Le capitaine des douanes Gennesseaux, commandant la compagnie de forteresse de Longwy, a été cité à l’ordre de la division le 19 août 1919, mais n’avait-il pas été blessé à son poste de combat le 24 août 1914 ?

 

 

 

Longwy – Porte de Bougogne en 1914 à la veille des combats

Parmi les nombreux douaniers morts, disparus et blessés au combat, quatre seulement d’entre eux bénéficient d’une citation en cette fin 1919. Pourtant, dans une situation analogue, la 1e et la 2e compagnie du bataillon de forteresse des douanes de Belfort avaient été citées à l’ordre de la division dès le 6 mai 1915.

Le 13 mai 1920, enfin, le Ministre de la Guerre, André Lefèvre, cite la garnison de Longwy, à l’ordre de l’armée, pour avoir : « sous l’énergique commandement du gouverneur de la place, le lieutenant-colonel Darche, du 164ᵉ R.I., rempli complètement le rôle qui lui était assigné, dépassant ce qu’on pouvait attendre d’une aussi faible troupe, isolée dès les premiers jours de la mobilisation dans une Place datant de Vauban et dont le déclassement avait déjà été décidé.

 

La citation, qui comporte attribution de la Croix de Guerre avec Palme, précise que la garnison : « bien qu’abandonnée à ses seules ressources, a su en imposer à l’ennemi, que l’activité de ses reconnaissances pendant toute la période de couverture, ne s’est pas laissée abattre par la retraite d’une Armée de secours parvenue jusqu’à ses glacis et a continué à se défendre jusqu’au moment où la ville a été détruite, les abris presque tous effondrés et deux brèches praticables faites dans le corps de la Place par l’ennemi prêt à donner l’assaut.»

 

Les unités qui composaient alors la garnison de Longwy sont :

 

–    le 4ᵉ bataillon du 164ᵉ régiment d’infanterie, commandé par le chef de bataillon Laurans.

 

–    le 5ᵉ bataillon du 45ᵉ régiment d’infanterie territoriale, commandé par le chef de bataillon Dronzée.

 

–    la 5ᵉ batterie, commandée par le capitaine Bérault, et la demi-25ème batterie, sous les ordres du capitaine Louis, du 5ᵉ régiment d’artillerie à pied.

 

–    la demi-compagnie 6/3 territoriale du génie, commandée par le lieutenant Gasquet, le chef de bataillon Reynier commandant le génie de la forteresse.

 

–    la compagnie de forteresse des douanes de Longwy, commandée par le capitaine Gennesseaux, capitaine à Longwy, que secondaient le lieutenant Descamps, lieutenant à Cosnes, et le lieutenant Menu, lieutenant à Hussigny.

 

–    le détachement de sapeurs pompiers de Longwy.

 

 

Remise de la Croix de guerre avec palme : la cérémonie de Strasbourg en janvier 1921

 

Strasbourg : Le drapeau des bataillons de douaniers et sa garde. À gauche, en uniforme, M. Chappellu, directeur, ancien commandant pendant la guerre des unités de douane de la 7e armée

La garnison de Longwy ayant été citée, le Ministre de la Guerre, André Lefèvre, a fait connaître à son collègue des Finances, François Marsal, de qui relevait l’administration des Douanes, que le drapeau du corps militaire des Douanes avait le droit d’arborer la Croix de Guerre avec Palme.

 

La cérémonie de remise a lieu au cours d’une prise d’armes qui se déroule le samedi 15 janvier 1921, au début de l’après midi, à Strasbourg où se trouve le drapeau des bataillons douaniers.

Le temps est incertain, maussade et humide, mais un public nombreux se presse aux alentours de la place Broglie. Dès quatorze heures, les différents détachements des troupes de la garnison de Strasbourg prennent position sur la place.

 

A quatorze heures trente, le gouverneur général Humbert, fait son entrée sur la place, monté sur un cheval blanc. Il est chaleureusement salué par la foule, ainsi que son état-major. La musique du 401e régiment d’infanterie joue « la Marseillaise ».

 

Le gouverneur passe le front des troupes en revue, puis il est procédé à la remise des décorations. L’instant est émouvant.

 

Général de corps d’armée Georges Louis Humbert. Né en 1862, fils de gendarme, major de Saint-Cyr, officier d’infanterie coloniale, il sert au Tonkin, à Madagascar et au Maroc avant de commander le 32ᵉ corps d’armée, puis la 3ᵉ armée pendant la guerre de 1914 – 1918. Nommé gouverneur militaire de Strasbourg et commandant supérieur des territoires d’Alsace en 1919, il est décédé en activité à Strasbourg en novembre 1921.

Le général de corps d’armée Humbert remet la première décoration au drapeau des bataillons de douaniers : Croix de Guerre avec Palme.

 

Ensuite, il remet la Cravate de Commandeur de la Légion d’Honneur au général de division Paquette, au colonel Randier et au lieutenant-colonel Bruckard.

Quatre officiers sont décorés de la Rosette d’Officier de la Légion d’Honneur. Quinze officiers reçoivent la Croix de Chevalier de la Légion d’Honneur, ainsi que dix civils.

 

Puis le général de Boissieu remet dix Médailles Militaires, une Croix de Guerre et une Médaille du Dévouement. A quinze heures trente la cérémonie se termine, au son des marches militaires, par un magnifique défilé des troupes devant le gouverneur et les nouveaux décorés.

 

Le 2 février 1921, une circulaire du directeur général des douanes a porté cette manifestation à la connaissance de l’ensemble des services. M. Boley précise notamment :

 

«Ainsi se trouve consacrée la part active que les unités de douaniers ont prise à la défense du pays pendant la guerre et qui a valu (…) à la plupart des formations appelées à l’activité les appréciations élogieuses des officiers généraux qui les ont commandées.

 

Les douaniers de 1914 – 1918 se sont montrés, en tous points, dignes de leurs aînés.

 

 

Le coussin d’honneur, orné de la Croix de guerre

 

 

Coussin d’honneur, orné de la Croix de Guerre (Direction Régionale de Paris)

La citation à l’ordre apparaît au 19ᵉ siècle pour récompenser les actes de courage et les actions d’éclat des militaires au combat, dans les opérations menées hors de France.

En décembre 1914, après une campagne de presse lancée par Barrès, une proposition de loi est déposée tendant à instituer une médaille de la « Valeur Militaire », destinée à commémorer les citations individuelles.

En février 1915, Driant présente à la Chambre un rapport sur la création d’une Croix de Guerre, officiellement instituée par la loi du 18 avril 1915 et destinée à commémorer, depuis le début des hostilités, les citations à l’ordre des armées, des corps d’armées, des divisions, des brigades et des régiments.

 

Claude Pèlerin

 

La vie de la douane
N°203 – Mai 1986
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