Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes

Du rôle militaire des douanes pendant la guerre de 1870 : l’escarmouche d’Audun-le-Tiche (30 août 1870)

Mis en ligne le 1 juillet 2020

 

Le rôle militaire de l’administration des Douanes pendant la guerre franco-allemande de 1870-1871 reste largement méconnu. Certes, les grands événements, qu’il se fut agi de la mort du préposé Pierre Mouty (1), du siège de Strasbourg (2), de Bitche (3) ou de Paris et de la Commune, ont été largement vus, tant par les historiens militaires (4) que par les publications professionnelles (5) et les travaux d’agents des Douanes (6). Mais, au travers de ces faits ponctuels, on ne touchait guère la réalité de ces fameux Bataillons douaniers qui marquent l’imaginaire de l’administration depuis la fin du Premier Empire.

 

Surtout, le passage d’une administration au caractère fiscal et à l’organisation militaire le long des frontières, à des brigades armées, en unités combattantes, a été tout bonnement ignoré. Des raisons d’ordre bibliographiques, notamment suite à l’incendie du ministère des Finances, en mai 1871, et certainement idéologiques l’expliquaient, comme l’a judicieusement analysé l’historien des Douanes françaises, Jean Clinquart (7).

 

Mais, que représentaient quelques trois mille hommes, sans réelle coordination, tous assiégés dans diverses places fortes, et surtout sans haut fait d’armes, dans une guerre qui souffrait l’opprobre de l’opinion nationale. L’armée avait trop besoin de se dédouaner d’un échec qui ne pouvait être que politique pour s’encombrer, dans ses relations d’après-guerre, d’unités non proprement militaires. Les historiens qui suivirent, par méconnaissance de la nature « amphibie », selon le mot de Boucher de Perthes, des Douanes, négligèrent tout simplement de se pencher sur cette histoire au profit d’un autre, plus louable car diplomatique, politique et stratégique.

 

Un incident amplement ignoré au plan national permet toutefois de revenir sur l’action militaire des Douanes pendant la période impériale de cette première guerre franco-allemande. Il intervenait le 30 août 1870. À Beaumont, l’armée de Châlons, commandée par Napoléon III et le maréchal Mac-Mahon, subissait sa première défaite. Trois jours plus tard, ce fut Sedan. La guerre « impériale » touchait à sa fin. Avec elle, disparaissaient non seulement un régime, mais aussi les opportunités de mouvement des armées françaises.

 

Les places fortes de Strasbourg et de Metz étaient déjà assiégées ; celle de Longwy ne devait pas tarder à l’être. Mais, avant que l’étau prussien se refermât sur cette cité du Pays-Haut, le commandant de la place, le lieutenant-colonel Massaroli, entendait marquer son entrée en guerre d’un acte d’éclat. Et, il confia l’opération aux douaniers…

 

La principalité de Longwy et la guerre

 

Les effectifs douaniers dont disposait la place de Longwy s’élevaient au nombre de cent quatre-vingts officiers et hommes. Ils provenaient des différentes brigades de la principalité de Longwy. La penthière de cette dernière s’étendait tout le long de la frontière du grand-duché du Luxembourg, d’Audun-le-Tiche à Longlaville (quatre bureaux), et du Royaume de Belgique, de Cussigny à Fagny (neuf bureaux); un quatorzième bureau était installé à la seule gare que comptait la principalité, installée à Mont-Saint-Martin et desservant la Belgique. Les brigades installées sur les routes menant à ces deux pays dépendaient des capitaineries de Longwy et de Villers- la-Montagne, avec trois lieutenances à Mont-Saint-Martin, Hussigny et Crusnes. À la tête de la principalité de Longwy se trouvait un inspecteur (8).

 

 

Dès la déclaration de guerre, le 18 juillet 1870, les brigades de Metz et de Strasbourg furent réorganisées de façon à renforcer la garde des postes, même les plus petits, et assurer, dans le même temps, l’observation nécessaire des activités ennemies de l’autre côté de la frontière. Mais, bien qu’ayant reçu un supplément de munitions, les agents continuèrent à assurer normalement leur service de surveillance.

 

Toutefois, les escarmouches qui les opposèrent bientôt à des patrouilles de uhlans prussiens, puis la mort du préposé Mouty lors de l’incursion de Schreckling, dans la soirée du 23 juillet, amenèrent le Gouvernement impérial à mobiliser les douaniers (9). Deux décrets furent pris, les 26 et 27 juillet, mettant « le corps d’armée des Douanes (…) à disposition du ministre de la Guerre dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin » et affectant « les brigades armées de l’administration des Douanes appartenant aux directions de Metz et Strasbourg (…) au service militaire de la frontière » (10).

 

Dans le même temps, Paris mettait en état de siège lesdits départements et plaçait les places fortes des 5e et 6e divisions militaires en défense (11). Bien qu’encore éloigné du théâtre principal des opérations, Longwy et ses douaniers entraient dans la guerre.

 

Conformément aux ordonnances des 31 mai 1831 et 9 septembre 1832, les agents du service actif des Douanes furent incorporés dans les Bataillons de réserves des Douanes. La principalité de Longwy formait, avec des capitaineries, deux compagnies du Premier Bataillon (Thionville) de la Première Légion des Douanes Françaises (Metz) attachée à l’armée du Rhin (12). Compte tenu de cette militarisation, le sous-inspecteur Depreux prenait le commandement des deux compagnies longoviciennes avec rang de commandant.

 

Les unités douanières étant intégrées au dispositif de défense des places fortes (13), les compagnies de Longwy et de Villers-la-Montagne furent mises à disposition du lieutenant-colonel Massaroli. Comme la situation ne le commandait pas encore, il ne les appela pas immédiatement à renforcer sa garnison, les laissant se replier « à l’approche de l’ennemi » (14). Pour le moment, les deux compagnies envoyées de Metz par le 44° Régiment d’Infanterie, le 28 juillet 1870, suffisaient au service de la place. Sous le commandement du capitaine Morel et du lieutenant Falot, elles représentaient une force de six officiers et cent dix hommes ; s’ajoutait encore les soixante-neuf artilleurs de la 2e batterie du se Régiment d’Artillerie, aux ordres du capitaine Rive (15).

 

Les douaniers, pour leur part, commencèrent à collaborer aux patrouilles des gardes nationales sédentaires entre Audun-le-Tiche et Longwy. Mises en place à compter du 19 août, par les maires de Russange, Jean Gobeltz, et de Rédange, Gabriel Welter, elles devaient empêcher l’exportation des vivres, dissiper les effets de la propagande ennemie, chasser les vagabonds suspects d’espionnage et avertir les autorités militaires des mouvements de troupes ennemies (16).

 

Toutefois, la tournure prise par la bataille des frontières, après les défaites françaises de Forbach et de Froeschwiller, le 6 août, et l’investissement de Strasbourg, trois jours plus tard, mit rapidement un terme à la participation des douaniers à cette ligne d’information et de défense civile. L’arrondissement de Briey était coupé de Metz (17).

 

 

Longwy était sans nouvelle des combats du sud du département (18), le lieutenant-colonel Massaroli n’avait plus de communication avec le maréchal Bazaine à Metz et avec le maréchal Bazaine à Metz et avec le sous-préfet Ghéerbrant à Briey (19). La garnison fut appelée à se trancher dans la place. Une soixantaine de gardes forestiers de la compagnie des guides forestiers du Jura et de la Moselle, commandés par le garde général des forêts Louis Colin, et trente gendarmes à cheval, aux ordres du maréchal des logis Coutin, l’avaient rejoint dès le 18; les douaniers commencèrent à arriver quatre jours plus tard.

 

Pour Massaroli, il était « urgent de faire replier le plus tôt possible sur Longwy les brigadiers de Douaniers qui (étaient) encore à l’extérieur »

 

Le 24 août, ils avaient tous quitté leurs postes et fonctions sur la frontière. « La douane (.. .) s’est sauvée » diront les maires de Russange et de Redange (20)…

 

Affectés « exclusivement au service de l’Infanterie avec le 4e de ligne », les douaniers commençaient leur service aux deux portes de la place de Longwy. Aussitôt après leur installation, le commandant Depreux devait ordonner « chaque jour l’exercice à sa troupe, et (prendre) une heure dans la journée pour exécuter le tir à la cible » (21).

 

L’équipement dont disposaient les hommes, un mousqueton modèle 1843, semblait convenir au paquetage militaire. Mais, il en allait autrement de leur manière de servir. À tel point que le lieutenant-colonel Massaroli fut obligé de signifier aux « Douaniers ( …) de suivre l’école du soldat» (22).

 

Le service des douaniers se faisait principalement à la porte de Bourgogne. Douze, puis dix-huit, vingt-quatre hommes, et enfin dix (23), sous les ordres d’un sergent et d’un caporal, y étaient affectés en service ordinaire. Trois hommes étaient encore détachés auprès du 44e de Ligne à la porte de France (24).

 

Mais ce service prit fin le 15 septembre 1870. Ceux qui n’étaient employés aux portes s’acquittaient des différents services de la place. Des douaniers, en compagnie de fantassins, travaillèrent ainsi à des destructions de bâtiments qui gênaient les pièces d’artillerie et les points d’observation de la place forte (25). Un piquet fut même envoyé garder, le 23 septembre, les vivres réceptionnés de Belgique en gare de Mont-Saint-Martin. Avec le renforcement du siège autour de Longwy et l’arrivée dans la forteresse de nombreux civils, trente douaniers, deux caporaux, deux sous-officiers et un officier furent affectés à la police de la garnison (26).

 

Les douaniers, la frontière et la guerre

 

Les rôles des douaniers ne se limitèrent toutefois pas seulement à la défense de la ville. Ces bons connaisseurs du Pays-Haut mosellan, d’Audun-le-Tiche à Fagny, furent également utilisés dans des « missions de reconnaissance ».

 

La première d’entre-elles intervint le dernier jour du mois d’août. Le 27 août, tard dans la nuit, la garde nationale sédentaire avait transféré à Longwy un sujet bavarois, Valentin Heyl, officiellement employé des mines de fer luxembourgeoises. En fait, il avait été surpris par la patrouille de Gabriel Welter en flagrant délit d’espionnage dans une auberge d’Audun-le-Tiche (27). L’événement n’aurait suscité aucune réaction du commandant de la place forte s’il n’était pas intervenu quelques heures après l’arrivée des cavaliers du premier escadron du Magdeburgischen Husaren-Regiments 10. Le Rittmeister von Kleist saisit ce prétexte pour se livrer à une pratique dont les armées coalisées du royaume de Prusse et des confédérations de l’Allemagne du Nord et des États du Sud : le rançonnement.

 

Depuis quinze jours que durait sa reconnaissance sur les devants des troupes « allemandes », il avait écumé les caisses des postes, des notariats, des perceptions et de l’enregistrement qui n’avaient pas été repliées ; sinon, il avait simplement prélevé une contribution sur le village. Ainsi, le 12 août à Château-Salins et Nancy, ou le 27 à Villers-la-Montagne (28)… Déjà, le 23 juillet précédent, à Schreckling, les uhlans, après avoir attaqué le poste frontière, n’avaient pas manqué d’emporter la caisse de l’enregistrement (29).

 

 

Heyl étant un agent des services de renseignement prussiens, Kleist fit appréhender, le 28 août, Welter pour l’arrestation arbitraire « d’un sujet bavarois comme prétendu espion » (30). Pour cette attitude, il devait être fusillé dès l’aube. L’insistance du maire d’Audun-le-Tiche, Eugène Bauret, pour faire libérer son collègue de Rédange amena l’officier prussien à reconsidérer son attitude. Il demanda au maire de se rendre à Longwy pour proposer au commandant de la place forte un échange de deux prisonniers; Bauret devait en outre ramener une rançon de dix mille francs. L’officier français considéra l’offre comme irrecevable. Il consentait à libérer Heyl mais pas à verser un centime pour Welter. Et Kleist d’imposer les citoyens d’Audun-le-Tiche (31)…

 

Les événements de la nuit amenèrent le lieutenant-colonel Massaroli à convoquer le conseil de défense de la place le 29 août. Il y expliqua l’attitude de Kleist, les incursions de plus en plus en profondeur des patrouilles ennemies. Afin de masquer la faiblesse de sa garnison, moins de trois cent hommes, il estimait qu’une sortie dans cette bourgade distante de vingt kilomètres, à la surprise d’une patrouille de la puissance d’un escadron, ferait forte impression sur l’ennemi (32).

 

Afin de préserver les qualités de défense de la place, mais aussi parce que ses hommes « (connaissaient) parfaitement le pays (33), » il fut décidé que l’opération serait menée par la douane. Elle devait débuter le soir même, à onze heures. Cent onze douaniers, auxquels se joignirent vingt gardes forestiers et vingt gendarmes sortirent de Longwy, commandés par le capitaine des Douanes Lostie de Kerhor. Comme cet officier de cinquante-deux ans n’était en poste à Villers-la-Montagne que depuis moins de dix mois, il lui fut adjoint le lieutenant de Crusnes, Jean Zwiefel.

 

Par une marche rapide de nuit, suivant la vallée de la Senelle, la colonne arriva au contact de l’ennemi peu avant l’aube. Un forestier, Adolphe Becker, qui avait mené une reconnaissance à Audun-le-Tiche dans la nuit, le rejoignit (34). À l’entrée de Villerupt, deux hussards aperçurent la discrète colonne.

 

 

A l’issu d’un bref échange de coups de feu, un douanier avait été sérieusement blessé, les deux sentinelles mises hors de combat et leur relève en déroute (35). L’altercation ne donna pas l’alerte aux cavaliers endormis d’Audun-le-Tiche. La ville offrait aux assaillants trois entrées, au nord vers le Luxembourg, au sud vers la route de Thionville à Longwy, les douaniers venant par celle de l’est. Il était facile de prendre au piège les Prussiens endormis en les privant de leurs issues. À quatre heures trente du matin, le détachement de Longwy se scinda en trois colonnes en vue de l’attaque. La première, aux ordres de l’adjudant Nicolas Fournier, anciennement brigadier des Douanes à Crusnes (36), devait empêcher que l’ennemi refluât vers Villerupt. La seconde, commandée par le capitaine Lostie de Kerhor, devait couper la route d’Esch-sur-Alzette et progresser vers la troisième colonne, qui avait contourné les bois pour arriver par la route d’Aumetz sous la direction du lieutenant Zwiefel.

 

Le plan se serait sans doute bien déroulé comme prévu si le commandant de la colonne avait eu une connaissance pratique du terrain.

 

Mais il se trompa de route et, au lieu de couper la voie de retraite vers le Luxembourg, il déboucha directement au milieu du village. La surprise prussienne fut totale. Des hussards furent surpris au détour d’un jardin. Des coups de feu fusèrent des rangs français.

 

Au loin, dans Audun-le-Tiche, le trompette Wagner fit retentir l’alerte (37). Les hussards entreprirent de résister; les douaniers durent investir presque chaque maison. Une embuscade leur fut tendue sur la place, en contrebas du village et de la route sud ; deux agents de la brigade d’Audun, Michel Bastian et Christophe Brunvarlet, furent frappés mortellement (38). Réveillé par les premiers coups de feu, le Rittmeister von Kleist monta précipitamment en selle et s’élança en direction de la fusillade. Accueilli par une volée de balles, il revint aussitôt sur ses pas, donnant par son action le signal de la débandade. Dans le même temps, les gendarmes à cheval de la brigade de Longwy se lancèrent aux trousses des fuyards, les poussant sur la route d’Esch-sur-Alzette (39).

 

Les instructions qui avaient été remises à Kleist ie 26 août insistaient expressément de bien respecter la ligne frontière luxembourgeoise (40). Aussi, la colonne prussienne, forte d’une centaine de cavaliers, obliqua vers le bois, après avoir suivi sur quatre cents mètres la route. Pensant gagner le village frontalier d’Ottange, sur le plateau, afin de rejoindre Aumetz, elle s’enfonça dans la forêt. Et de déboucher dans Rumelange, violant malgré elle la neutralité luxembourgeoise. Cet incident ne manqua pas d’occasionner un incident diplomatique entre le Luxembourg et la Prusse.

 

Les combats cessèrent avec la fuite des Prussiens, le maréchal des logis Coutin ne disposant pas d’assez d’hommes pour les poursuivre. L’escarmouche d’Audun-le-Tiche avait fait huit morts, cinq blessés, quatre disparus et quatorze prisonniers dans les rangs allemands (44), deux tués et dix-sept blessés dans les rangs français. Naturellement, les plus lourdes pertes incombaient aux douaniers (45). Ils « (n’avaient) jamais reculé devant le danger : ils (avaient) ( …) réclamé de partir, même sachant qu’ils n’avaient aucune chance d’échapper à la mort (46). »

 

La colonne française se mit en ordre de marche aussitôt les premiers soins apportés aux blessés et le rassemblement des prisonniers, des chevaux (47) et du matériel saisi. Vers dix heures du matin, le capitaine Lostie de Kerhor et ses hommes quittèrent Audun le- Tiche pour retourner à Longwy. Une fois regroupés autour d’Aumetz, les hussards du Rittmeister von Kleist retournèrent à Audun pour y récupérer leurs blessés. Deux hussards furent inhumés au cimetière municipal de la cité (48) et cinq autres dans celui d’Aumetz. Le commandant prussien parla de représailles, dépêcha une compagnie d’infanterie pour brûler le village, puis se calma. «Les soldats régalés par les habitants s’en retournèrent ensuite à Aumetz » (49).

 

En ce 30 août 1870, leur fait d’arme victorieux était un des derniers que l’Empire devait connaître. A Beaumont, l’armée de Châlons se heurtait à la poussée des armées coalisées du royaume de Prusse et des confédérations de l’Allemagne du nord et des États du sud. Trois jours plus tard, c’était Sedan… Dans le Pays-Haut mosellan, la manœuvre de Massaroli apporta les résultats escomptés. Le siège de la place forte ne devint pas véritablement effectif avant la mi-novembre.

 

Ainsi, quelque cinq cents hommes, sous-officiers et officiers, échappés de Sedan, purent renforcer la faible garnison et ses capacités opérationnelles. D’autres sorties étaient rendues possibles. Le 20 septembre, sur le même schéma que l’escarmouche d’Audun-le-Tiche, une sortie fut organisée sur le village d’Arrancy, à vingt-deux ldlomètres de Longwy. Puis, ils y eurent encore, les 1° et 27 décembre, celles de Villers-la-Montagne et sur Fresnoy-la-Montagne et Tellancourt.

 

 

Enfin, ce furent les combats en avant de la place, le 14 et 15 janvier 1871, ultimes sursauts avant que Longwy ne se rendît, dix jours plus tard. Mais, dans cette nouvelle donne militaire, les douaniers qui avaient si fièrement combattu à Audun-le-Tiche n’avaient plus la première place. Leur rôle se limitait le plus souvent à un service d’appoint, en réserve de l’infanterie sur le terrain ou de l’artillerie sur les remparts (50).

 

Gérald ARBOIT,
Docteur en Histoire contemporaine de l’université Robert Schuman de Strasbourg III

 


(1) « Le monument du douanier Mouty à Chateaurouge », in La vie de la douane, 1959, pp. A-F, et Roger Corbaux, « L’affaire de Schreckling », in La vie de la douane, 1983, n° 193, pp. I-VI.
(2) P. Texier, « Les douaniers au siège de Strasbourg en 1870 », in Cahiers d’histoire des Douanes françaises, 1990, n° 9.
(3) À Claude Pèlerin, « En 1870, des douaniers devant le conseil de guerre », in Ibid, 1985, n° 2.
(4) E. Belhomme, Histoire de l’infanterie en France (Paris, Lavauzelle, 1902), État-major de l’armée (section historique), La guerre de 1870 publiée par la Revue d’Histoire, 10 volumes (Paris, 1901-1905), ainsi que Opérations à l’Est (Paris, 1907), Georges Roux, La guerre de 1870 (Paris, Fayard, 1966).
(5) La Douane et les forêts, 1885-1895, Les Annales des Douanes, 1911 et 1916, La vie de la Douane, 1980 et 1983, et les Cahiers d’histoire des Douanes françaises, op. cit.
(6) E. Lepine de Barfleur, Recueil nominatif des douaniers mobilisés pendant la guerre de 1870-1871 (Paris, Balitout, Questroy et Cie, 1872), Victor Barbier, Monographie des directions des douanes, établie sur les documents officiels et les publications les plus récentes, 2 volumes (Paris, Berger- Levrault, 1890), Jean Clinquart, L’administration des Douanes en France de la Révolution de 1848 à la Commune (1848-1871) (Neuilly, Association pour l’histoire de l’administration des Douanes, 1983), pp.363-409, Jean Clinquart, La Douane et les douaniers (Paris, Tallandier, 1990), pp.138-139.
(7) op. cit., pp. 364-367
(8) Annuaire des Douanes, 1870, pp. 59-61.
(9) Jean Clinquart, L’administration des Douanes. . ., op. cit., pp. 368-369.
(10) Journal militaire officiel, 1870, 2′ semestre, pp. 272 et 276. Cette mobilisation fut généralisée à tout le corps des Douanes par décret du 9 août 1870 (Jean Clin quart, op. cit., pp.374-3’75).
(11) Journal militaire officiel, décrets des 26 et 27 juillet 1870, pp. 272 et 275.
(12) « La guerre de 1870-1871. La défense nationale en province. Mesures générales d’organisation. Chapitre XIV. Douaniers et forestiers » in Revue d’Histoire rédigée à l’état-major de l’Armée (section historique), n° 119, novembre 1910, p. 284 n.2.
(13) Lois et règlement des Douanes françaises, 1859, circulaire du 1er mai 1859, n° 585.
(14) Service Historique de l’Armée de Terre (SHAT), Ln 6, Carnet pour tenir note des renseignements et détails concernant le service de la place donnés au rapport journalier, note du 11 août 1870.
(15) SHAT, op. cit., Livre d’ordre de la place de Longwy, ordre n° 20 du 8 septembre 1870, pp. 82-83 (copies in Ermest Massaroli, La défense de Longwy devant le conseil d’enquête et l’opinion publique (Paris, Lachaud Burdin, 1878), pp. 19-22 et Férréol Welter, L’escarmouche d’Audun-le-Tiche le 30 août 1870. Sa provocation, ses péripéties, ses conséquences (Hettange-Grande, 1921), pp. 105-107) et A. Martinien, La mobilisation de l’armée. Mouvements des dépôts du 15 juillet .1870 au 1′ mars 1871 (Paris, L. Fournier, 1912), p. 180. Voir aussi R. Pagny, « Le siège de Longwy, 1870-1871 », in Bulletin de l’association des Amis du Vieux Longwy, 1974-1, pp. 7-8.
(16) Lettres de Jean Gobeltz à Gabriel Welter, de Gabriel Welter à Jean-François Gauche, à Jean Gobeltz du 19 août 1870, citées in Férréol Welter, op. cit., pp. 83-85. Voir aussi pp. 17-18.
(17) Bulletin du renseignement du 60 Corps d’Armées du 19 août 1870, d’après une dépêche télégraphique de « l’intendant du 6e Corps en ce moment à Verdun », cité in Revue d’Histoire, op. cit., n° 80, août 1907, pp. 496-497.
(18) Note du lieutenant-colonel Massaroli au maire de Longwy sur une lettre des maires de Rédange et Audunle- Tiche du 24 août 1870, citée in Férréol Welter, op. cit., p. 88.
(19) Lettre du iieutenant-colonel Massaroli à Gabriel Welter du 25 août 1870, cité in Ibid., p. 89
(20) Lettre des maires de Redange et d’Audun-le-Tiche du 24 août 1870, op. cit.
(21) SHAT, op. cit., notes des 17, 18 et 22 août 1870
(22) Ibid. note du 5 septembre 1870. Voir la relation du même ordre dans un carnet déposé depuis peu aux Archives municipales de Longwy et publié par Maurice Noël dans Le Pays-Haut, 1998, n° 3-4, pp. 111-112
(23) Ibid., notes des 24, 29 août, 15 et 30 septembre 1870.
(24) Ibid., note du 24 août 1870.
(25) Ibid., note du 26 août 1870.
(26) Ibid., note du 30 septembre 1870.
(27) Ferréol Welter, op. cit., p.19.
(28) Ibid., p. 29 n.1.
(29) Jean Clinquart, op. cit., p369.
(30) Laissez-passer d’Eugène Bauret pour se rendre à Longwy, rédigé par le Rittmeister von Kleist, cité par Férréol Welter, op. cit., p. 25 : «… eines bayrischen Unterthanen, der dort als angeblicher Spion… »
(31) Ibid., pp. 28-39, Herbet von Thielen, Geschichte des Magdeburgischen Husaren-Regiments Nr 10 (Hanovre, 1888), p. 147, Gérald Arboit, Terres-Rouges. Le fer et le feu à Audun-le-Tiche (Knutange, Comité d’établissement ARBED, 1997), p. 37.
(32) Ermest Massaroli, op. cit., p.19 n.1.
(33) SHAT, Ln 6
(34) Ibid.
(35) Ferréol Welter, op. cit., p. 47 : la relève profita de l’incident pour disparaître dans la nature (un correspondant du journal luxembourgeois L’Avenir, dans une lettre du 30 août publiée le 2 septembre 1870, déclare qu’elle rejoignit Audun pour donner l’alerte). Quand aux deux vedettes, elles se débandèrent dans l’usine de Sainte- Claire, proche du lieu de l’échauffourée, où elles furent recueillies par le directeur Hergott (Archives privées, Notes de l’instituteur Filon, du 10 mars 1923 sur « l’affaire du 29/30 août 1870 », pp. 1-3, citant un article du journal allemand d’Aschersleben).
(36) Voir l’article que lui consacra le journal Le Longovicien, mi-janvier 1907, à la suite de son décès, le 4 janvier 1907, à l’âge de 80 ans. Son attitude à Audun-le- Tiche lui valut, selon le journal, le grade de lieutenant des Douanes. Il finit sa carrière, en 1880, à Bezange-la- Grande comme capitaine. Il se retira ensuite à Crusnes (Archives municipales de Crusnes, Registre des naissances, mariages, décès, 1903-1912, année 1907, f. 2).
(37) Herbert von Thielen, op. cit., p.150
(38) Archives municipales d’Audun-le-Tiche (AMALT) Registre des naissances, mariages, décès, 1863-1872, année 1870, f. 23. Le décès de Jean-Baptiste Christophe Brunvarlet, 52 ans, préposé à La Malmaison, fut enregistré le 30 août, à 9 heures du matin. Celui de Michel Bastian, 29 ans, préposé à Audun-le-Tiche, le fut le lendemain, à 8 heures; il laissait une jeune veuve de 19 ans, Marie- Annick Michel. Michel Bastian était le fils de Jean-Pierre Bastian, 54 ans, préposé des Douanes à Launstroff, canton de Sierck. La commune d’Audun-le-Tiche participa aux frais d’inhumation de cet agent pour 13 francs (AMALT, Registre des délibérations du conseil municipal, vol. 3, séance du 3 juin 1871, f. 150)
(39) SHAT, ln. 6, Registre de correspondance, lettres de Massaroli au secrétaire de la légation de France à Bruxelles, de Bersolle, du 30 août, et au président du gouvernement de défense nationale, le général Trochu, du 12 septembre 1870, pp. 70 et 71.
(40) Ferréol Welter, op. cit., p.57.
(41) Sur cette question, voir Archives de l’Eta, Luxembourg, H 29, « Guerre entre la France et la Prusse. Neutralité du grand-duché du Luxembourg », vol. I, IX et Christian Calmes, Le Luxembourg dans la guerre de 1870, vol.8 (Luxembourg, Saint-Paul, 1970), pp. 77-81. Voir aussi Luxemburger Zeitung des ler et 2 septembre, L’Avenir du 2 septembre 1870.
(42) SHAT, Ln 6, Livre d’ordre de la place de Longwy, ordre n° 20 du 8 septembre 1870, pp. 82-83.
(43) Dans son rapport à Bersolle, Massaroli note que « le commandant » a été tué. Puis, dans celui qu’il adresse à Trochu, il précise que « le capitaine et le lieutenant (sont) au nombre des tués » (Ibid., Registre de correspondance, pp. 70-71). Toutefois, la Verlustliste ne fait état que d’un sergent tué et d’un maréchal des logis gravement blessé.
(44) La Verlustliste Nr 103 et les rectificatifs du 20 octobre 1870 établissent les pertes à six tués, quatre blessés et six disparus (Ferréol Welter, op. cit., pp. 107-109). Un témoignage repris par Bion, fait état de huit morts (dont deux portés disparus par les autorités militaires prus(39) SHAT, ln. 6, Registre de correspondance, lettres de Massaroli au secrétaire de la légation de France à Bruxelles, de Bersolle, du 30 août, et au président du gouvernement de défense nationale, le général Trochu, du 12 septembre 1870, pp. 70 et 71.
(45) SHAT, op. cit., lettre de Massaroli au général Trochu du 12 septembre 1870, p.71. La correspondance adressée à chaud à Bersolle ne fait état que d’un tué et douze blessés et l’ordre n° 20 n’admet que deux tués et six blessés.
(46) Jacques Mortane, Douaniers en mission (Paris, Baudinière, 1933), p. 10.
(47) Les chevaux furent vendus aux enchères le 12 septembre (SHAT, op. cit., ordre n° 21 du 11 septembre 1870, p. 84 ; voir aussi la relation qui en est faite in Maurice Noël, op. cit., pp. 115-116). Certains chevaux furent affectés aux gendarmes de Longwy.
(48) Le décès des hussards Jonas Carl Kronberg et Friedrich August Beyer, portés disparus par les autorités militaires prussiennes, ne fut pas enregistré à l’état-civil d’Audun-le-Tiche.
(49) Ferréol Welter, op. cit., p. 57 et AMALT, Registre des délibérations du conseil municipal, op. cit., séance du 3 juin 1871, f. 151, la commune dépensa 48,95 francs en viande pour les militaires prussiens blessés.
(50) Ernest Massaroli, op. cit., pp. 32, 35, 65.

 

 

Cahiers d’histoire

de l’administration des douanes

N° 22

1er semestre 2000

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