Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes

 La féminisation en douane au XIXe siècle: des avancées prudentes

Mis en ligne le 1 mars 2021

Chaque 8 mars, la « journée de la femme » constitue aujourd’hui une célébration devenue traditionnelle. Temps forts des symboles mis au premier plan pour soutenir les efforts constants des pouvoirs publics en vue de l’établissement d’un traitement équitable sans considération de sexe, elle vise ainsi à se rapprocher des idéaux démocratiques et républicains.

 

Elle puise son inspiration dans l’article 6 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui énonce : « Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. « 

 

Si l’accès des femmes aux emplois douaniers mérite une attention particulière, c’est aussi parce que l’histoire enseigne, au-delà des symboles, la lente et difficile marche des femmes pour disposer d’un traitement égalitaire dans l’accès au monde du travail, notamment au sein de la fonction publique.

Cet article présente quelques repères chronologiques, utiles pour guider le lecteur dans ses recherches et approfondissements sur ce thème.

 

  • Magnien, Boucher de Perthes : des dirigeants douaniers ouverts à la féminisation

 

Plusieurs réflexions sont relevées dans les écrits des dirigeants de l’administration douanière.

 

Tel est le cas dans les réflexions de l’un des trois administrateurs de la Régie des douanes, Vivent Magnien, qui estime en 1802 que les fouilles à corps réalisées sur des femmes, par des hommes, faisait souffrir « la décence et la pudeur ». Décision est prise de confier cette tâche aux épouses des douaniers, qui seraient pour cela rémunérées.

 

Plus tard, en 1859, Boucher de Perthes, alors directeur des douanes à Abbeville,  prononce un discours très progressiste pour l’époque devant la société impériale d’émulation de sa ville (société savante dont il est le président-fondateur) : « De la femme dans l’état social, de son travail et de sa rémunération ». Il estime notamment que tous les emplois douaniers devraient être ouverts au femmes. Il conclut sa réflexion en ces termes : « Qu’une société protectrice de l’ouvrière se forme parmi les femmes assez riches pour pourvoir au travail de quelques-unes ! que chacune se charge de patronner un groupe ! qu’elles s’engagent à donner aux femmes toutes les fonctions, toutes les fournitures, tous les travaux qui rentrent dans ceux dont on les a si injustement dépouillées ! En agissant ainsi, en réhabilitant la femme dégradée par la misère, la femme aura sauvé la femme, et avec elle la société.

 

La plaie ainsi guérie et cicatrisée, cette foule étiolée, née de la faim héréditaire et qui peuple aujourd’hui nos cités, fera place à une génération belle et forte qui, une fois de plus, démontrera cette vérité que c’est la vertu, le bien-être et la santé des mères qui font la force et la grandeur des fils ».

 

La phrase fait mouche, et témoigne d’un esprit ouvert aux idées nouvelles et aux aspirations d’une concorde sociale. Il est noté qu’elle se finit tout de même par la « grandeur des fils » [… et non des filles !]

 

Si les esprits sont de plus en plus ouverts, la réalité demeure très différente. La femme n’est pas encore admise dans les Ministères…

 

  • 1884 à 1907 : entrée timide des femmes dans les administrations centrales de l’État

 

Il faut attendre le 23 avril 1884, pour qu’un décret permette l’intégration de femmes dans l’administration des Postes et Télégraphes. Seul le ministère des Finances puis le Quai d’Orsay vont suivre ce mouvement.

 

Ce sont en réalité les machines à écrire qui font entrer les premières femmes dans les administrations, comme l’indique Jean Baillou dans Les Affaires étrangères et le Corps diplomatique français.

 

Elles demeurent peu nombreuses, à peine une dizaine à la veille de la Première guerre mondiale.

 

Selon Vida Azimi : « « L’emblème de la féminisation massive est la dactylographe. En 1901, Millerand ouvre le premier concours pour « dames dactylographes » au ministère du Commerce, suivi bientôt par d’autres ministères. En 1913, neuf ministères sur douze ont un cadre de dames dactylographes (Justice, Affaires étrangères, Intérieur, Instruction publique, Travaux publics, Agriculture, Travail, Postes, Finances, Contributions directes et Douanes) totalisant 300 personnes » ( La féminisation des administrations françaises : grandes étapes et historiographie (XVIIIe siècle – 1945), Revue Française d’Administration Publique et Ena, 2013, dossier consacré à la La place des femmes dans les élites administratives)

Bureau des dactylographes vers 1920, au Ministère des finances, rue de Rivoli – Source  http://www.desfemmesquicomptent.com/etre-femme-dans-ladministration/

 

Les femmes font leur entrée officielle en douane au début du XXe siècle, avec le recrutement en 1907 de 10 dactylographes, mais elles seront longtemps cantonnées aux emplois administratifs.

 

  • 1916 : les auxiliaires pour suppléer au manque de main d’oeuvre masculine

 

Il faut attendre le début du XXe siècle pour que quelques femmes soient associées au travail douanier.

C’est à la faveur du premier conflit mondial que des femmes furent recrutées dans le service sédentaire des douanes. Les multiples vacances d’emploi créées par la mobilisation des hommes rendirent nécessaires ces opérations de recrutement.

 

Photo F. Roche (collection Aimé Pommier) – Direction des douanes à Strasbourg en 1945

L’article suivant présente le développement de l’emploi douanier à compter de la Première guerre mondiale :

 

 

Historique de la présence des femmes dans l’administration des douanes

 

 

 

 

 

 

 

Arnaud Picard

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