Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes
Le SOFI dans mon entreprise
«La Vie de la Douane» a rencontré M. Veillard, directeur adjoint, responsable du département «Douane» de la société Danzas , commissionnaire agréé. M. Paillon, déclarant principal, participait à l’entretien. Ils ont bien voulu nous indiquer leur sentiment sur le Système d’Ordinateurs pour le Fret International (SOFI). (NDLR La Vie de la Douane -1981)
Vie de la Douane : Quand et dans quelles conditions l’entreprise Danzas a-t-elle adopté le Système d’Ordinateurs pour le Fret International (SOFI)?
M. Veillard : Nous avons adopté le S.O.F.I. en 1978 lors de son inauguration au bureau des douanes de Paris-La Chapelle. Danzas est d’ailleurs une des premières entreprises en France à avoir bénéficié de ce système pour le trafic terrestre.
Cela dit, l’informatique n’était pas une nouveauté pour nous. Nous utilisions déjà, pour la rédaction des déclarations en douane, une imprimante à boule fonctionnant à partir de programmes que nous élaborions nous-mêmes. Ces déclarations étaient rarement rejetées lors des contrôles.
V. D. : Comment êtes-vous passés de votre propre système informatique au SOFI ?
M: Paillon : Facilement. Nos déclarants travaillant déjà sur ordinateur ont accueilli le SOFI sans difficulté. Nous avons naturellement apporté quelques modifications à nos méthodes.
Auparavant le déclarant établissait une pré-déclaration qu’une opératrice saisissait ensuite sur machine Matra/ Datapoint.
En cas d’erreur, le déclarant qui vérifiait le document douanier avant signature pouvait toujours l’annuler et en établir un nouveau. Depuis 1978, le poste d’opératrice a été supprimé. Le déclarant, responsable de déclarations, valide directement. II ne peut plus faire marche arrière lorsqu’il décèle une erreur, mais bénéficie de la compréhension de l’administration s’il la signale avant que le service de la douane locale, ne s’en aperçoive.
V.D. : Vous êtes ce que l’on appelle dans le jargon informatique des utilisateurs privatifs ?
M.Veillard : En effet. Danzas ne traite pas avec une unité banalisée de dédouanement, gérée par la douane ou par la Chambre de Commerce. Nous possédons dans nos locaux trois écrans et deux imprimantes. Cela pour nos bureaux parisiens de La Chapelle. C’est en quelque sorte la douane à domicile.
Danzas bénéficie de cette procédure grâce à un nombre suffisant de déclarations à savoir quelques 100 déclarations import et 250 export par jour.
V.D. : Vous utilisez le SOFI depuis 3 ans. Quels avantages en retirez-vous ?
M. Veillard : Le SOFI a incontestablement accéléré les opérations de dédouanement. Toutefois, avec le renforcement de la réglementation et l ‘exigence de certains documents, type déclaration d’importation ou certificat d’origine, les bons à enlever (BAE), qui autrefois étaient donnés d’office, ne le sont plus. Je pense notamment aux textiles. Mais ce n’est pas une conséquence du SOFI.
D’autre part le SOFI indiquant les documents obligatoires à présenter lors du dédouanement, si nos dossiers sont complets, nous serions en droit d’obtenir un BAE très rapidement. Ce n’est pas toujours le cas.
En revanche, l’administration des Douanes fait un effort louable pour les lots sur camions : il y a rarement blocage du moyen de transport. Enfin, si un importateur a un besoin urgent de marchandises, le dédouanement peut avoir lieu dans l’heure qui suit leur arrivée au bureau.
M. Paillon : En tant que déclarant principal, le plus gros avantage que je tire du SOFI est une grande fiabilité dans l’application et la connaissance de la réglementation. La mise à jour des informations intégrées au SOFI est très rapide. Si le déclarant oublie d’appliquer une réglementation, le système l’en avertit. Le SOFI présente à ce niveau une sécurité incontestable.
En outre, seuls les éléments essentiels sont obligatoires. En procédure manuelle, par exemple, nous devions préciser, outre la NDP, la référence tarifaire exacte et un libellé. Le SOFI ne demande que le premier élément, donc simplification. Autre avantage : la tenue informatisée de la comptabilité : entre les bordereaux du receveur des Douanes et les montants que nous déclarons, les écarts sont nuls.
V.D. : Le SOFI présente-t-il des inconvénients ?
M. Paillon : Disons certaines anomalies. Ainsi les premiers chapitres du tarif ne sont pas intégrés au SOFI ni la réglementation afférente. Par exemple, nous avons déclaré du porto pour lequel sont prévus des contingents en droit réduits. Nous pensions que le contingent restait ouvert, dans des limites restreintes toutefois. Nous avons téléphoné au bureau gérant de Rouen; le contingent était clos. L’avis aux importateurs est arrivé plus tard. Il v a donc un décalage pendant lequel nous serions susceptibles de ne pas appliquer la réglementation. D’où des risques financiers non négligeables.
V. D. : Et les pannes ?
M. Veillard : Les pannes existent, c’est sûr. Elles nous gênent parfois aux heures de pointes (fréquentes en trafic routier), on nous frôlons déjà l’embouteillage. Heureusement, des procédures de secours ont été mises en place en collaboration avec l’administration des Douanes. Nous utilisons alors les états de codage, à charge pour nous de réintroduire ensuite dans le SOFI les renseignements nécessités par le dédouanement.
Il faut donc faire le travail deux fois et en un temps réduit, ce qui est pénalisant. On petit bien sûr envisager l’hypothèse d’une grande panne : Cergy-Pontoise cessant complètement de fonctionner Il faudrait probablement revenir à des procédures manuelles qui désorganiseraient complètement la marche de l’entreprise et qui, en raison de complexité de la réglementation, poseraient de sérieux problèmes à l’administration des Douanes elle-même.
V. D. : Que pensent nos clients du SOFI ?
M. Veillard : Procédure manuelle ? Procédure SOFI ? Peu importe. Les importateurs souhaitent. seulement obtenir leurs marchandises rapidement et sans problèmes.
V.D. : Le dédouanement informatisé n’est pourtant pas un service gratuit ?
M. Veillard : Il y a bien eu une incontestable augmentation du coût de la déclaration après la mise en place du SOFI.
Il faut toutefois prendre de nombreux paramètres en compte, différents suivant les sociétés, les types de trafic, etc… De plus l’accélération des procédures représente un avantage lui-même difficile à chiffrer.
Enfin il faut remarquer que le coût de la déclaration est resté bloqué depuis 1978 (6,50 F à l’export et 24 F à l’import), ce qui représente une baisse importante en terme réel.
En cas de dégroupage le SOFI ne rend pas forcément service, puisqu’il faut réexpédier les marchandises sur d’autres bureaux. Qui dit informatique, dit une certaine centralisation; les CRI.) et les procédures simplifiées vont à l’encontre de ceci. Le dégroupage implique des créations de titres de transit sur des CRD qui ne sont pas sofitisés. Les entreprises perdent du temps et de l’argent.
V.D. : Avez-vous des améliorations à proposer ?
M. Paillon : Dans la programmation, oui. Nous avions, alors que nous utilisions notre propre système, mis des «garde-fous». Je vous citerai un exemple : vous indiquez par erreur un code franco frontière en ajoutant toutefois du fret. II y a là incompatibilité que le système devrait signaler.
Je pense aussi aux éléments mobiles que le SOFI ne réclame pas lorsqu’il s’agit de politique agricole commune.
M. Veillard : Nous avons quelque temps subi les crises de croissance du SOFI; nous sommes maintenant plus optimistes.
V.D. : Quelles sont vos relations avec la Douane ?
M. Veillard : Dans une optique très dynamique de l’informatique, la Douane essaie de trouver des solutions qui concilient une bonne application de la réglementation et les impératifs des opérateurs dû Commerce Extérieur. Mais évidemment, si le SOFI accélère le dédouanement, il permet aussi un renforcement des contrôles, notamment à l’exportation. Ceci confirme cependant le rôle normal de la Douane.
Nous, nous jouons la carte de la concertation et de la coopération, et nous attendons encore plus de l’informatique. Je crois que l’administration des Douanes le comprend très bien.
La Vie de la douane
N° 189
Décembre 1981