Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes

A la recherche du « cinéma douanier » …

Mis en ligne le 1 janvier 2023

La typologie habituelle permettant de classer les productions cinématographiques fait la part belle au « film policier », entre thriller, film d’action, d’aventure ou autres drames. Le « film douanier » aurait-il une existence propre, serait-il une sous-catégorie du film policier, ou n’aurait-il aucun caractère qui lui soit propre ?

 

L’histoire de la production cinématographique française permet de donner un début de réponse.

 

La douane dans le cinéma, une histoire ancienne ?

 

La présence du douanier dans les productions cinématographiques est ancienne. En 1905, un court métrage des cinémas Pathé évoque La visite de la douane.

Extrait de « la visite de la douane »

Épousant les goûts du public, la figure du douanier soupçonneux est ici mise en scène de façon burlesque à la frontière, lors d’un contrôle de passagers. Les 2 minutes aboutissent au contrôle d’une femme, peu à peu dévêtue et faisant apparaître de nombreuses marchandises de fraude.

 

Au-delà de la période, qui constitue le temps des pionniers du cinéma, cette production est emblématique du « style » dans lequel les rôles et scènes de douane se retrouvent cantonnées.

Le douanier et le contrebandier constituent un binôme de même nature que celui du gendarme et du voleur. Il est décliné dans un style « vaudeville », où l’objectif est avant tout de faire rire le public et jouer sur les stéréotypes du douanier au poste frontière, tatillon et soupçonneux.

 

 

 

Le douanier, objet de comédie

Suivant ses premières apparitions cinématographiques, la douane et les douaniers sont d’abord des objets de comédie ou de satire sociale.

 

Qu’il s’agisse de Vous n’avez rien à déclarer ? avec Raimu, de Trafic sur les Dunes (1950) ou encore du film La loi c’est la loi, avec Fernandel et Toto (1958), les mêmes ressorts sont utilisés et le douanier sert souvent d’événement déclencheur dans le scenario. Il interrompt Paulette et Edmond brutalement dans Vous n’avez rien à déclarer, par son irruption soudaine dans un wagon de train.

Extrait de la loi c’est la loi (1958)

 

Le binôme douanier / contrebandier est mis en scène dans La loi c’est la loi, où la situation du douanier à la frontière espagnole est mise en difficulté mais où finalement c’est le contrebandier qui vient le rechercher, car il n’est plus rien sans lui.

 

L’ abominable homme des douanes (Darry Cowl) met en scène un douanier modeste, Camposantos tourné en dérision par le jeu de l’acteur.

 

En 1965, s’inspirant des déboires de la French Connection, Gérard Oury met en scène Bourvil et Louis de Funès dans Le Corniaud. Le sujet douanier inspire donc, et met en scène les plus grands acteurs français du XXe siècle.

Le corniaud (Gérard Oury)

 

La frontière est un lieu idéal pour les quiproquos et échanges dans la pénombre. C’est encore là, cette fois sur la frontière belge, que le célèbre Rien à déclarer de Dany Boon actualise en 2011 l’enjeu d’une douane où la proximité sociale et linguistique brouille les cartes… mais toujours avec sourire et dérision.

 

De la comédie au thriller, la douane comme acteur de la lutte contre les grands trafics

Dès 1937, la douane sert de toile de fond au film Le fraudeur. Un titre de travail « Ceux de la douane » a été refusé par la censure pour ce film dramatique qui insiste sur les dangers de la fraude.

 

 

La douane et les douaniers deviennent une profession respectée et c’est de manière beaucoup plus sérieuse voire tragique que leur sort ou rôle est évoqué, par exemple en 1959 dans Classe tous risques, où Lino Ventura et Jean-Paul Belmondo croisent le fer. L’histoire se base sur le destin d’un ancien malfrat « Abel Danos ». Deux douaniers interviennent à un moment clé du synopsis et se trouvent engagés en première ligne pour mettre fin à des agissements frauduleux.

 

Le sujet douanier est ainsi très sérieux et tantôt utilise le métier et sa position dans la lutte contre les trafics (Porte d’orient, 1950), tantôt constitue la transposition de faits réels, comme en 2013 avec Gibraltar, épousant le point de vue d’un ancien « aviseur », situé au cœur des trafics.

 

 

Arnaud Picard

 

 

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