Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes
Les réunions douane – magistrature
L’article publié dans le journal La vie de la douane en 1979 (J.F.P. n°179) retrace l’origine des journées d’études douane – magistrature, organisées pour la première fois en 1975 sous l’égide de M. Jacquemart, sous-directeur en charge des questions juridiques, contentieuses et de la lutte contre la fraude.
Des résultats fructueux
Les journées d’études douane-magistrature ont été organisées pour la première fois en 1975, pour que soient examinés au niveau régional, à la faveur des questions posées par les magistrats et des cas d’espèce soumis à leurs juridictions, les problèmes particuliers soulevés par l’application du droit pénal douanier.
L’objectif était ainsi de surmonter, grâce à une meilleure information entre service douaniers et magistrats, les difficultés qui pouvaient naître à l’occasion des poursuite judiciaires engagées pour la répression des infractions douanières et de change.
Ces journées d’études sont le prolongement normal au plan régional des relations confiantes et amicales qui se sont instaurées depuis plusieurs années entre les services de la chancellerie et ceux de la direction générale des douanes. Ces relations se sont d’abord établies à l’occasion des diverses réunions interministérielles consacrées à l’étude des projets et conventions internationales, des textes communautaires et des textes législatifs ou réglementaires intéressant directement ou indirectement l’administration des douanes ; elles se sont développées plus récemment au sein du groupe de travail créé pour l’élaboration de l’instruction commune sur les poursuites judiciaires en matière douanière et cambiaire. Elles se sont naturellement poursuivies pour examiner les difficultés que pouvait soulever l’application de la loi du 29 décembre 1977 accordant des garanties de procédure aux contribuables, laquelle, en particulier, organise sur des bases nouvelles les rapports entre les services douaniers et les autorités judiciaires.
L’intérêt de telles rencontres peut s’expliquer aisément. En premier lieu, il faut bien reconnaître que, faute d’information de notre part, le droit pénal douanier, droit spécial, était parfois mal connu quant à ses finalités de ceux qui étaient appeler à le traiter au niveau judiciaire.
Les pouvoirs dévolus aux agents des douanes, la force probante attachée à leurs procès-verbaux, les présomptions légales d’infraction résultant par exemple de la réunion d’éléments matériels tels qu le transport ou la détention, sans justification d’origine, de certaines marchandises alimentant des trafics frauduleux, étaient mal compris. Il n’apparaissait pas toujours clair que les particularités du droit pénal découlaient du caractère très fugitif de l’infraction douanière qui ne peut généralement être constatée qu’au moment du franchissement de la frontière.
LA NECESSITE D’UNE CONCERTATION
Dans le même ordre d’idées, il devenait de plus en plus opportun d’expliquer les difficultés rencontrées par les services douaniers pour constater des fraudes élaborées d’une manière toujours plus astucieuse à la faveur des réglementations nouvelles nationales ou communautaires souvent complexes et des facultés accordées pour développer les échanges internationaux. Il était bon aussi d’informer les magistrats des caractéristiques des plus graves infractions relevées et de leurs conséquences (versement d’avantages indus portant sur les montants compensatoires monétaires, les restitutions à l’exportation, la constitution d’avoirs à l’étranger sous le couvert de transferts financiers ayant comme supports de subtiles majorations de valeur de marchandises importées, par exemple).
La nécessité d’une concertation entre les magistrats et les agents des douanes se faisait également d’autant plus sentir que le code des douanes, jusqu’à la loi du 29 décembre 1977, contenait des dispositions contraires aux nouveaux textes libéraux du code de procédure pénale en matière de détention provisoire et, surtout, limitait considérablement le pouvoir d’appréciation des juges au moment où le législateur leur accordait des pouvoirs accrus notamment par la loi du 11 juillet 1975, pour individualiser les sanctions applicables aux délits de droit commun.
Enfin, il fallait que s’établisse une meilleure information réciproque sur les responsabilités incombant respectivement à l’administration des douanes et au ministère public dans le domaine de la répression des infractions douanières. Telles sont les principales préoccupations qui ont conduit à l’organisation de journées d’études douane-magistrature.
UN CLIMAT DE MUTUELLE COMPREHENSION
Les chefs de service interrégionaux et directeurs régionaux des douanes en liaison avec les premiers présidents et procureurs généraux des cours d’appel réunissent donc périodiquement les responsables des services douaniers régionaux, les magistrats qui ont à connaître des procès douaniers et les fonctionnaires de la direction générale des douanes et droits indirects. Participent également à ces réunions un représentant du ministère de la justice, le chef de l’agence de poursuite de la direction nationale des enquêtes douanières et le chef des services de police détachés auprès de cette direction nationale.
L’ordre du jour de ces réunions établi à partir des questions posées par les magistrats intéressés est généralement consacré aux questions évoquées ci-dessus, mais depuis 1978 les dispositions de la loi du 29 décembre 1977 sont également examinées. Ce sont plus spécialement celles concernant les nouvelles relations qui doivent s’instaurer entre les services douaniers et les autorités judiciaires pour l’exercice du droit de transaction après engagement des poursuites et pour l’octroi de remises totales ou partielles des sanctions fiscales, après jugement définitif.
Précédée d’un court exposé introductif des représentants qualifiés de la direction générale, chaque question donne lieu à un débat très ouvert où sont confrontés, en toute franchise et dans un climat de mutuelle compréhension, les divers points de vue. L’intérêt que suscitent certaines questions se prolonge d’ailleurs souvent au cours des échanges de vue qui s’engagent tout le long du repas amical qui clôture ces rencontres.
Les journées d’études douane-magistrature contribuent ainsi à développer des relations amicales entre responsables des services douaniers et magistrats afin que des rapports suivis et empreints de confiance soient entretenus au plan local pour surmonter les difficultés qui pourraient apparaître à l’occasion de certaines affaires dans le respect mutuel des responsabilités incombant aux uns et aux autres.
Leurs résultats ont toujours été très fructueux. C’est ainsi qu’à partir des observations formulées par les magistrats à l’occasion de ces réunions, la direction générale des douanes et droits indirects en accord avec la direction des affaires criminelles et des grâces a été conduite à modifier ou compléter certaines dispositions de l’instruction commune sur les poursuites judiciaires des infractions douanières et de change, concernant les modalités de mise en mouvement de l’action fiscale.
Après quelques années d’expérience, il m’est agréable de constater que les objectifs assignés à ces réunions ont été atteints.
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M. Jacquemart
La Vie de la Douane
n°179
Mars 1979