Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes

Années 1950 : les premières contrôleuses puis les hôtesses

Mis en ligne le 1 mars 2021

Au cours des années 1950, la douane s’ouvre de façon un peu plus grande aux femmes, même si le lecteur du XXIe siècle ne saura s’empêcher de juger cette ouverture encore « timorée ».

 

Il s’agit dans un premier temps de l’ouverture du concours de contrôleur au personnel féminin (I), et dans un second temps de la création douanière des « hôtesses » des douanes… voulue comme l’ « atout charme » de la douane française ! (II).

 

 

I. Des femmes contrôleuses des douanes : 1955 et le numerus clausus

 

Le statut des contrôleurs des douanes du 23 janvier 1954 prévoit leur recrutement externe ou interne et leur formation commune sous la forme d’une scolarité de six mois, auquel s’ajoute un stage professionnel de même durée.

 

Des candidates pouvaient être recrutées, selon un pourcentage fixé par le Directeur Général, en raison du caractère « spécifique » des fonctions proposées. Seul le service de surveillance demeurait réservé aux hommes, pour tenir compte de ses spécificités et d’un régime jugé « paramilitaire » et donc constituant un véritable rempart encore infranchissable pour les femmes.

 

Les premières femmes de catégorie B arrivent donc dans les effectifs des services douaniers (opérations commerciales) à compter de 1955.

 

Premier stage d’hôtesses des douanes – photo Francis Roche

II. Des hôtesses des douanes : favoriser l’accueil des voyageurs : 1959 – 1979

 

Les années 1950 marquent le développement du tourisme et des voyages. Les hôtesses de l’air jouissent alors d’un grand prestige, et la Direction Générale s’empara en 1959 de l’idée de créer un stage dédié d’ « hôtesses » des douanes.

 

Opération de relations publiques, il s’agissait selon l’idée du Directeur Général concepteur de cette idée, M. de Montrémy, d’améliorer l’image de la douane auprès du public et des voyageurs internationaux. Véritable « coup de communication », il fallait frapper les esprits en démontrant auprès des usagers la modernité douanière et sa qualité d’accueil et d’information.

Roissy, 1960 : une hôtesse des douanes accompagne ses deux collègues de la surveillance sur le tarmac (photo Francis Roche – coll. Aimé Pommier)

Le 18 mars 1959, les premières candidates à ces nouvelles fonctions, sélectionnées parmi les contrôleurs, furent accueillies à l’Ecole Nationale des Douanes de Neuilly pour suivre le premier stage. Elles étaient au nombre de 11.

 

Le 18 avril 1959, le Ministre de l’Economie et des Finances, Antoine Pinay, présenta ces nouvelles recrues au cours d’une conférence de presse. Ces dames étaient habillées par un grand couturier qui créa leur costume suivant un modèle proche de celles de la compagnie Air France.

 

Leur formation s’étendait des langues étrangères, à la réglementation douanière applicable au tourisme, à la psychologie et aux relations publiques. Des cours de maintien, de maquillage étaient également dispensés… disciplines plus éloignées des matières plus habituellement professées à l’END. Un stage pratique complétait cette formation, permettant de découvrir les zones aéroportuaires de Bruxelles, Londres, Rome ou Genève.

 

 

L’uniforme spécifique des hôtesses demeura plusieurs années, jusqu’à la fin des années 1970, régulièrement remodelé à la suite d’un concours proposé aux plus grands couturiers.

 

Selon Jean Bordas (1968)* : « Elles sont implantées sur les grands aéroports et quelques points de passage importants : Le Havre, Hendaye, Strasbourg, Kehl, Menton. Leur mission consiste à faciliter aux voyageurs l’accomplissement des formalités douanières. Bien que celles-ci aient déjà été fortement allégées, elles sont encore considérées comme gênantes et favorisent les « bouchons » dans le flot des touristes. S’il en est ainsi, c’est que, le plus souvent, les voyageurs eux-mêmes ne sont pas bien au courant, en général, des obligations qui continuent à leur être imposées. […] Les hôtesses contribuent à améliorer la situation. Tout d’abord en rendant le premier contact du voyageur avec l’Administration plus agréable, plus souriant. Ensuite, en lui expliquant la nature et les modalités du contrôle – elles savent en effet l’Anglais et une autre langue. Enfin, en l’aidant, s’il y a lieu, dans l’accomplissement matériel des formalités. Spontanément, elles se mettent à la disposition des voyageurs qui leur paraissent avoir le plus besoin de leur concours, personnes âgées ou accompagnées de jeunes enfants. Elles collaborent en cela avec les hôtesses des compagnies aériennes et celles de l’Aéroport de Paris. »

 

Au fil du temps, par manque de consistance dans l’accueil ou le faible intérêt du public pour la demande de renseignements douaniers conduit à confier à ces hôtesses des fonctions plus classiques : taxation des marchandises, la mise en dépôt des marchandises … voire l’infliction des pénalités, en totale contradiction avec l’idée originelle de ce service.

 

Les hôtesses participeront encore à quelques foires internationales et salons, aux manifestations officielles, mais faute de recrutement spécifique et d’un besoin confirmé par l’expérience, cette fonction disparut au début des années 1980.

1965 – une hôtesse accompagne ses collègues douaniers garde-côtes au salon nautique

 

Les anciennes hôtesses se reconvertirent par la suite dans des tâches plus habituelles : « Très rapidement, il devint évident que ces jeunes femmes ne pouvaient pas assurer les fonctions qu’on leur avait assignées. Elles devinrent tout simplement les adjointes des inspecteurs qu’elles secondaient pour les taxations comme pour toutes les autres tâches. La plupart de ces hôtesses, pour ne pas dire toutes, étant des agentes de qualité, elles apportaient une aide extrêmement utile et efficace » (Michel Sarraute, 1963*).

 

Sources :

  • Histoire de l’école des douanes (A. LAOT, 1993)
  • Extraits de récits autobiographiques de douaniers, 1937-1996 (De la penthière aux nouvelles frontières, éditions IGPDE)

 

Arnaud Picard

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