L’aviation des Douanes sur la Base Aérienne 106 de Bordeaux-Mérignac (1968-1989)

Mis en ligne le 1 novembre 2025

L’aviation douanière n’est pas un sujet souvent traité dans la presse aéronautique, seulement un article dans le Trait d’Union (revue de l’association éponyme) et un autre dans Le Fana de l’aviation.

 

Localement, Sud-Ouest n’y a consacré que deux articles en 21 ans de présence sur la base.

 

Du côté des sources militaires, l’article paru dans Le Charognard (revue interne de la base) n’est pas très utile et les journaux des marches et opérations (JMO) ne mentionnent rien.

 

A cela on peut ajouter une page assez complète sur le site web d’un collectionneur de patchs de la Douane. Il existe aussi un CD-ROM auquel je n’ai plus accès, j’y avais quand même relevé quelques informations.

 

Après une brève introduction générale, ce document traite exclusivement de Bordeaux-Mérignac pendant la période 1968-1989.

 

Une présentation de l’histoire de la base aérienne 106  peut être consultée sur ce site en cliquant : ici

 


Historique

 

Après la seconde guerre mondiale, l’administration française des Douanes envisage l’emploi d’hélicoptères pour la surveillance aéromaritime des côtes méditerranéennes. Elle débute en 1950 avec des appareils loués puis reçoit son premier hélicoptère, une Alouette II, en 1962. L’année suivante elle crée à Saint-Mandrier (Var) la base du Groupement douanier d’hélicoptères.

 

Devant le succès rencontré, elle souhaite appliquer un dispositif semblable sur l’Atlantique, en particulier pour surveiller les bâtiments de pêche étrangers se trouvant en situation irrégulière. L’hélicoptère se révélant inadapté a l’étendue de la zone, elle se tourne alors vers un avion bimoteur. C’est ainsi que le 24 juillet 1968, le Groupe Aérien Atlantique des Douanes est créé sur la base aérienne 106 de Bordeaux-Mérignac. Cependant, il ne reçoit son premier avion, un Dornier 28, qu’en février 1969 (*). Sa mise en service fait l’objet d’une cérémonie le 9 avril 1969 en zone civile.

 

A compter du 27 novembre 1974, le chef de service interrégional des douanes à Bordeaux informe l’administration centrale de la mise en place dans sa circonscription d’un bureau aéronaval (BAN), en application d’une décision administrative nationale parue quelques mois plus tôt.

 

L’achèvement de la formation technique de l’officier aérien Robert Béguier, inspecteur central, lui permet dès avril 1975 d’assurer le contrôle direct de la brigade de surveillance aérienne (BSA) de Mérignac, placée sous son autorité. Les fonctions de chef du bureau aéronaval de l’interrégion du Sud-Ouest lui sont confiées. Indépendamment des fonctions qui lui sont dévolues en tant que chef du BAN, M. Béguier assure la coordination opérationnelle de la surveillance aérienne sur la façade Atlantique-Manche.

 

Dans les années 70 les Douanes étendent leur champ d’action à la mission aéroterrestre : la surveillance des aérodromes secondaires et du trafic aérien privé. Cette même année un SOCATA (Morane-Saulnier) MS.893E Rallye est basé à Bordeaux pour assurer la mission aéroterrestre sur le Sud-ouest. Il y restera jusqu’en 1983, la nouvelle base de Toulouse héritant alors de cette mission.

 

Le Dornier 28 n’étant pas adapté à la surveillance de la zone économique exclusive (ZEE) des 200 nautiques, soit 360 km, la BSA de Mérignac reçoit son premier Cessna 404 Titan en août 1981. Par ailleurs, les Douanes participent à la mise au point d’une version de surveillance aéronautique du Reims-Cessna F406, baptisée Vigilant, qu’elles commandent en 1984. Après des essais menés sur l’année 1985, les deux premiers appareils sont réceptionnés en décembre à Bordeaux.

 

Les missions sont variées : essentiellement la surveillance de la ZEE, des bâtiments de pêche étrangers et la recherche de trafics illicites, mais aussi l’observation de mammifères marins, le sauvetage en mer par largage de canots et équipements de survie, le signalement de navires de guerre étrangers, la protection des épaves archéologiques….

 

Pour le suivi des nappes de pollution, la BSA de Mérignac est dotée en mars 1988 d’un F406 spécialement équipé, le Polmar (POLlution MARitime).

 

En 1988, un échelon mécanique au sol est créé.

 

L’aventure de la brigade des Douanes sur la BA 106 se termine en octobre 1989. Le hangar HM6 qu’elle occupait étant voué à la démolition pour permettre l’extension de la zone civile, elle rejoint la zone d’aviation générale de l’aéroport de Mérignac.

 

L’arrivée d’une nouvelle flotte aérienne de Beechcraft King Air 350 en remplacement des F406 et le souci de rationalisation de l’organisation ont conduit en 2014 à la dissolution de la brigade de surveillance aéromaritime des Douanes de Mérignac. Toutefois, la composante aérienne de la Douane est toujours présente à Mérignac. Depuis fin 2010, elle y a implanté sa base centrale de maintenance aéronautique, chargée du soutien technique pour l’ensemble de la flotte d’avions des Douanes.

 

Le HM6 en janvier 1985 (coll. Espace Traditions BA 106)

Son emplacement sur une vue de juillet 2025 (Google Earth / Airbus

 

 

Le HM6 faisait partie des hangars métalliques Jeumont-Daydé construits dès l’origine de la base, créée officiellement le 1er janvier 1937. La rangée, située dans une zone excentrée de la partie principale de la base, en comptait initialement quatre. Seuls deux ont survécu à la seconde guerre mondiale, ils ont été affectés à l’armée américaine de 1951 à 1958.

 

 

Les appareils mis en œuvre à Mérignac

 

Plus aucun n’est en service aux Douanes.

 

Dornier Do 28-B1

 Premier vol : 29 avril 1959

 2 moteurs à pistons de 250 ch.

 Vitesse : 250 km/h

 Autonomie : 5h30

 Distance franchissable : 1300 km

 Equipage : 2 pilotes + 1 mécanicien observateur

 

Dornier 28-B1 n°3111 F-ZBBK des Douanes françaises devant un hangar Jeumont-Daydé. Date inconnue. Photographe inconnu. Collection Tradis 106.

 

Premier appareil produit en série par la firme allemande Dornier après la guerre, le Do 27 est monomoteur de cinq places qui prend l’air en 1955. Fort du succès rencontré, Dornier étudie une version bimoteur qui vole en 1959, le Do 28. En plus de ses capacités de décollage et atterrissage courts ainsi que de vol lent, la caractéristique particulière de cet avion est la position inhabituelle des moteurs, placés sur les côtés à l’avant du fuselage.

 

 

Cessna 404 Titan

 Premier vol : 26 février 1975

 2 moteurs à pistons de 375 ch.

 Vitesse : 314 km/h

 Autonomie : 9h00

 Distance franchissable : 2700 km

 Equipage : 2 pilotes + 1 mécanicien observateur

 

 

La société américaine Cessna fait voler en 1975 un dérivé du Model 402, le Model 404 Titan qui est alors son plus grand avion bimoteur à hélices. Destiné au marché du taxi aérien et du fret, il est d’abord proposé en deux versions, 10 passagers ou mixte passagers/fret, puis une version exclusivement cargo.

 

Les livraisons débutent l’année suivante, il a été produit jusqu’en 1982.

 

Reims Cessna F406 Vigilant

 Premier vol : 3 mai 1985

 2 turbopropulseurs de 500 ch.

 Vitesse : 370 km/h

 Autonomie : 7h00

 Distance franchissable : 2600 km

 Equipage : 2 pilotes + 1 mécanicien observateur + 1 radariste

 

Créée en 1962 en prenant la suite de la société Max Holste (celle du Broussard), Reims Aviation, basée dans la ville éponyme, fabrique sous licence des avions Cessna. Elle développe avec cette société le bi-turbopropulseur F406 Caravan II pour 12 passagers, basé sur le fuselage du Cessna 404 Titan, il vole en septembre 1983. Sa vente et sa production sont assurées exclusivement par Reims Aviation. La version Vigilant spécifique à la surveillance aéronautique, dotée d’un radar à 360° Bendix 1500 placé sous le fuselage, effectue son premier vol le 3 mai 1985.

 

Si Reims Aviation n’existe plus, sa navigabilité est encore assurée par ASI Group.

 

L’ALAT l’a aussi mis en œuvre mais pas l’armée de l’Air.

 

F406-006 F-ZBEP des Douanes françaises. A l’occasion de la journée portes ouvertes à Dax le 21/06/1992. On voit le radar sous le fuselage. Photographe Pierre Pécastaingts.

 

 

Morane-Saulnier MS893E Rallye

 Premier vol : 7 décembre 1964

 1 moteur à pistons de 180 ch.

 Vitesse : 194 km/h

 Autonomie : 5h30

 Distance franchissable : 1100 km

 Equipage 1 pilote + 1 mécanicien observateur

 

Le biplace de tourisme et de sport Morane-Saulnier MS880A équipé d’un moteur de 90 ch. effectue son premier vol le 10 juin 1959 avant de donner naissance à toute une lignée de Rallye aux performances améliorées. Le MS893, qui vole en 1964, est un quadriplace de 180 ch. apte au travail aérien et au remorquage de planeurs.

 

MS893A Rallye d’une société privée sur l’aérodrome d’Arcachon-La Teste de Buch le 15/08/2008. Photographe Pierre Pécastaingts

 

Pour l’anecdote, Morane-Saulnier, à Tarbes, est devenue la SOCATA (*) en 1968, société à l’origine du TBM 700 (avec Mooney) utilisé par l’escadron « Médoc ». C’est aujourd’hui Daher, cette société assure toujours la navigabilité du Rallye.

 

Pierre Pécastaingts, réserviste citoyen,

Espace Traditions BA 106, version 1.0 du 05/09/2025.

 

 


Notes :

(*) – SOciété pour la Construction d’Avions de Tourisme et d’Affaires

 


Sources :

– Le Trait d’Union n° 179, 05/1998
– Le Fana de l’aviation n° 250, 09/1990
– Le Charognard (journal de la BA 106), 05/1977
– Sud-Ouest, 10/04/1969 et 02/09/1986
– CD des Douanes
– Site web de Roland Briand
– Site web Cessna Flyer Association

Remerciements à Monsieur Arnaud Picard, administrateur des Douanes.