Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes
L’altérité des frontières par Rachel Bouvet – Université du Québec à Montréal
Nous reproduisons ici, avec l’aimable autorisation de l’auteure et des responsables de publication, l’étude de Rachel Bouvet consacrée à « L’altérité des frontières » en guise d’introduction et de guide à la série consacrée aux « écrivains des frontières et la douane » :
Rachel Bouvet, « L’altérité des frontières », dans D. Chartier, H. V. Holm, C. Savoie et M. V. Skagen [dir.], Frontières, Montréal, Imaginaire | Nord et Bergen, Département des langues étrangères, Université de Bergen, coll. « Isberg », 2017, p. 11-28.
L’équipe de rédaction
Professeure au Département d’études littéraires de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Rachel Bouvet mène des recherches sur l’espace, le fantastique, la géopoétique, les théories de la lecture et le végétal. Elle a publié trois essais (Étranges récits, étranges lectures. Essai sur l’effet fantastique en 1998, Pages de sable. Essai sur l’imaginaire du désert en 2006, Vers une approche géopoétique. Lectures de Kenneth White, Victor Segalen et JMG Le Clézio en 2015), deux récits (Le vent des rives en 2014 et Tisser les voix en 2019) et codirigé plusieurs ouvrages collectifs (L’espace en toutes lettres en 2003, Nomades, voyageurs, explorateurs, déambulateurs en 2006, La carte. Point de vue sur le monde en 2008, Topographies romanesques en 2011, Géopoétique des confins en 2018). Membre de Figura, le Centre de recherche sur les théories et les pratiques de l’imaginaire, elle a cofondé La Traversée-Atelier de géopoétique et dirige actuellement le Groupe de recherche interdisciplinaire sur le végétal et l’environnement (GRIVE) ainsi que le partenariat ReVe (Reconnecter avec le végétal).
Résumé – Dans cet article, l’auteure s’intéresse à la frontière à la fois comme ligne, chez Julien Gracq, et comme zone, chez Nicolas Bouvier. À partir d’une triple perspective, sémiotique, géographique et littéraire, elle aborde ainsi la notion de « frontière » comme un déclencheur de situations marquées par la tension, processus sémiotique qui mène à l’autre et à l’altérité. Au contact de la frontière, qu’on la transgresse parce qu’elle nous fascine ou qu’on la traverse pour le plaisir du voyage, ce n’est qu’à partir du moment où l’on se dégage de l’altérité binaire (en miroir) que l’on peut envisager l’altérité des frontières (déstabilisation et perception du divers).
Motif spatial d’abord et avant tout, la frontière déclenche des situations marquées par la tension, un processus sémiotique qui conduit à l’altération, à la transformation identitaire, au métissage, à la créolisation. C’est à partir d’une triple perspective, à la fois sémiotique, géographique et littéraire, que j’aborderai la notion de « frontière » dans cet article. Je commencerai par exposer l’idée sous-jacente de « limite » ainsi que la différence entre la « ligne » et la « zone » à partir des travaux de géographes tels que Claude Raffestin. Puis, j’intégrerai ces réflexions à un questionnement plus général sur l’altérité en me servant principalement de la sémiotique de la culture élaborée par Yuri Lotman, qui a l’avantage de souligner l’ambivalence de la frontière, dont le rôle est à la fois de séparer et d’unir. Cela me permettra de distinguer deux manières très différentes de concevoir l’altérité : l’altérité binaire, d’une part, fondée sur la logique du miroir et donnant lieu aux clichés et aux stéréotypes; et l’altérité des frontières, d’autre part, perçue comme une tension vers ce qui est autre et basée sur la saisie de l’indétermination, la perception du divers, la déstabilisation. Je m’appuierai sur deux exemples tirés de la littérature pour voir comment dans un premier temps la fascination pour la carte peut mener à la transgression de la frontière — c’est ce qui se produit dans le célèbre roman de Julien Gracq Le rivage des Syrtes, dont j’analyserai un passage. Dans un deuxième temps, j’étudierai quelques scènes se déroulant aux frontières hongroise et iranienne dans le récit de voyage de Nicolas Bouvier L’usage du monde, afin de montrer que la tension peut être désamorcée par le recours à certaines stratégies, comme le rire, et que certaines pratiques sémiotiques telles que la musique permettent de transcender les différences culturelles. Il ne s’agit donc pas de comparer ces deux récits, dont l’un se situe dans le champ de la fiction alors que l’autre s’appuie sur une expérience réelle du voyage, mais bien d’observer deux cas de figure : chez Gracq, la frontière est conçue comme une ligne de séparation, tandis que chez Bouvier il s’agit plutôt d’une zone, d’un espace où les signes culturels de diverses provenances se côtoient. Cela dit, dans les deux textes, la frontière constitue l’un des enjeux principaux du récit.
Ligne, chemin, marche
Ainsi que l’écrivait Thierry Hentsch dans son ouvrage La mer, la limite publié juste après sa mort, « [p]enser “frontière”, c’est voir une ligne se dessiner dans notre tête » (1). Élément spatial, géométrique, la ligne a pour fonction de délimiter, de cerner, de borner. La ligne indique la limite d’un champ, d’une ville, d’un pays, d’un continent. Dans certains cas, elle peut s’élargir pour prendre la forme du chemin. Comme le rappelle Kenneth White dans son essai Limites et marges, « en latin, limes ne signifie pas seulement “frontière” (d’un empire, par exemple) mais aussi un simple chemin de terre entre deux champs » (2). Le limes, c’est ce qui borde le champ, ce qui permet de circuler d’un champ à l’autre, cet espace mitoyen où l’on marche, seul ou en compagnie des animaux que l’on mène au pacage. Les chemins creux bordés de haies et d’arbres ont longtemps joué ce rôle, en plus de servir à retenir la terre grâce aux racines et à contrer les effets dévastateurs du vent dans les régions situées près des mers. Dans certaines régions, les quelques chemins ayant subsisté après la transformation des pratiques agricoles et des paysages ruraux ont été déblayés pour devenir des lieux de promenade, des espaces dédiés à la marche, cette pratique dont on redécouvre peu à peu les vertus. Est-ce vraiment un hasard si ce terme, marche, est aussi employé pour désigner les postes-frontières, destinés à protéger le territoire et à servir de tampons en cas d’agression, au cas où l’ennemi s’aviserait de « marcher » sur nous ? Les marches étaient des seuils sur lesquels on érigeait des châteaux crénelés, des citadelles, des forts, des bastions. Et c’est en marchant au pas militaire, en faisant des rondes, que les soldats surveillaient la frontière. Sans compter que la frontière elle-même bouge : elle se déplace en fonction de l’avancée des troupes dans un territoire — il suffit de penser aux différentes colonisations ou aux guerres ayant marqué l’histoire. La ligne recule ou avance en fonction du désir de conquête, et les mouvements guerriers ont pour effet de redessiner le territoire.
Cette « ligne que l’on voit se dessiner dans notre tête », on sait qu’on la franchit quand on passe la douane, mais on n’en a jamais un aussi bon aperçu que quand on regarde une carte. Le géographe Claude Raffestin distingue trois étapes dans la fixation de la frontière : la définition, établie par l’entremise des échanges langagiers, des traités, des négociations, se situant donc sur le plan verboconceptuel ; la délimitation, prenant forme grâce aux dessins sur la carte, grâce à la représentation symbolique ; la démarcation, matérialisée par des bornes, des marques, des murs, des barbelés, concernant cette fois le plan physique (3). La manière de fixer la frontière change selon les cultures : en territoire nomade, par exemple, c’est la parole échangée qui compte; la frontière ne se fige jamais dans un tracé immuable, elle se déplace en fonction des ententes négociées entre les tribus. L’absence de démarcation peut donner lieu à l’incertitude, et la fascination pour ces signes composant la carte peut atteindre des proportions inégalées, comme on le verra plus loin. Dans les civilisations de l’écrit, il semble bien que ce soit la ligne dessinée sur la carte qui représente le mieux l’idée de frontière. Comme le souligne Vérane Partensky :
Ligne — dessin/dessein, disegno — dont la signature organise l’espace et impose à l’indistinction du sol le régime du Logos, la frontière instaure l’empire des signes; elle fait d’une surface simple ou confuse, page blanche ou terre vierge, un territoire à reconnaître — à parcourir et à représenter (4).
On peut donc affirmer que les lignes évoquées dans les romans construisent l’espace de la fiction. Et que les cartes, y compris les cartes narrativisées, jouent un rôle déterminant dans cette construction, même si elles ne prennent forme que dans l’esprit du lecteur.
La fascination pour la frontière
Le rivage des Syrtes de Julien Gracq est sans doute l’exemple le plus connu et le plus étudié quand il est question de frontière (5). La scène qui se déroule dans la chambre des cartes, dont j’étudierai quelques extraits, forme un beau morceau d’anthologie. Voici pour rappel un résumé de l’intrigue : Aldo, un jeune homme de bonne famille, est envoyé comme observateur dans un fort militaire aux confins du territoire d’Orsenna, au bord d’une mer vide, sur laquelle on se contente de faire des rondes sans qu’il y ait de menaces. Officiellement, Orsenna est toujours en guerre contre le Farghestan, ce pays qui se trouve de l’autre côté de la mer, mais il n’y a eu aucun contact entre les deux peuples depuis de nombreuses décennies. Cela dit, au lieu de lire la carte de manière froide et objective, à l’instar des diplomates et des militaires qui l’entourent au fort Bastiani, Aldo l’appréhende d’une façon qui n’a rien de conventionnel :
Je m’asseyais, toujours un peu troublé par cette estrade qui semblait appeler un auditoire, mais bientôt enchaîné là comme par un charme. Devant moi s’étendaient en nappes blanches les terres stériles des Syrtes, piquées de mouchetures de leurs rares fermes isolées, bordées de la délicate guipure des flèches des lagunes. Parallèlement à la côte courait à quelque distance, sur la mer, une ligne pointillée noire : la limite de la zone des patrouilles. Plus loin encore, une ligne continue d’un rouge vif : c’était celle qu’on avait depuis longtemps acceptée d’un accord tacite pour ligne frontière, et que les instructions interdisaient de franchir en quelque cas que ce fût (6).
Comme on s’en aperçoit à la lecture de cet extrait, ce sont des éléments visuels qui retiennent l’attention en premier lieu : la nappe blanche des lieux désertiques, les mouchetures des fermes, la guipure des lagunes. Le réseau métaphorique est celui du textile et de la couture — la carte est un tissu déposé sur une table, une nappe dans laquelle l’aiguille a été piquée à plusieurs reprises afin de la broder et de l’agrémenter avec de la dentelle. C’est donc la dimension esthétique de la carte que capte l’œil en premier. L’attention se déplace ensuite vers une ligne parallèle par rapport au rivage, une ligne pointillée noire, avant de repérer la ligne continue d’un rouge vif, un tracé curieusement abstrait. On quitte la dentelle pour le trait, pour les formes géométriques linéaires, parallèles, pour des tracés abstraits. Des signes que l’on reconnaît facilement puisqu’ils correspondent à la limite de la zone des patrouilles et à la ligne frontière, des signes dotés d’une forte charge symbolique, puisqu’ils cristallisent l’interdit qui pèse sur les habitants du pays.
La frontière fascine au point de provoquer
un véritable envoûtement et de créer
une atmosphère fantastique.
La frontière est ce qui sépare le « monde habitable » du territoire ennemi, de l’inconnu — ce qui limite le mouvement et la liberté. Le mouvement des yeux s’arrête, se fixe sur cette ligne marquée au fer rouge, « comme un oiseau que stupéfie une ligne tracée devant lui sur le sol » (RS, p. 32), cette ligne infranchissable que les yeux réussissent pourtant à survoler, comme on le constate dans la citation suivante :
[…] à laisser glisser tant de fois mes yeux dans une espèce de conviction totale au long de ce fil rouge, comme un oiseau que stupéfie une ligne tracée devant lui sur le sol, il avait fini par s’imprégner pour moi d’un caractère de réalité bizarre : sans que je voulusse me l’avouer, j’étais prêt à douer de prodiges concrets ce passage périlleux, à m’imaginer une crevasse dans la mer, un signe avertisseur, un passage de la mer Rouge. (RS, p. 32 ; l’auteur souligne)
Cette ligne de force de l’imaginaire fait surgir tout un ensemble d’images provenant des univers merveilleux des mythes et des légendes : on pense aux tourbillons de Charybde et au récif de Scylla, à tous ces passages périlleux qui attendent les navigateurs et les aventuriers ou les prophètes capables d’ouvrir des passages dans les mers infranchissables. Les lignes géométriques déplient une dimension symbolique, qui sera vite doublée d’une dimension exotique. En effet, l’espace inconnu est surtout perçu à travers le prisme de la langue étrangère, à travers les toponymes qui s’enchaînent pour former une litanie :
Très au delà, prodigieux d’éloignement derrière cet interdit magique, s’étendaient les espaces inconnus du Farghestan, serrés comme une terre sainte à l’ombre du volcan Tängri, ses ports de Rhages et de Trangées, et sa ceinture de villes dont les syllabes obsédantes nouaient en guirlandes leurs anneaux à travers ma mémoire : Gerrha, Myrphée, Thargala, Urgasonte, Amicto, Salmanoé, Dyrecta. (RS, p. 32)
Si ces noms sont évocateurs du lointain, c’est parce qu’ils renvoient à un territoire étranger, inconnu, exotique. Ils ne se rattachent pas à une cartographie familière, à une toponymie arpentée ; leur référent demeure insaisissable, inabordable, et c’est la matérialité du signe, sa dimension sonore (évoquée par les mots écrits), sa poésie qui retiennent l’attention. Cette lecture passionnée semble même à certains égards envoûtée, elle fait naître une atmosphère fantastique :
Debout, penché sur la table, les deux mains appuyées à plat sur la carte, je demeurais là parfois pendant des heures, englué dans une immobilité hypnotique d’où ne me tirait pas même le fourmillement de mes paumes. Un bruissement léger semblait émaner de cette carte, peupler la chambre close et son silence d’embuscade. […] La tête vide, je sentais l’obscurité autour de moi filtrer dans la pièce, la plomber de cette pesanteur consentante d’une tête qui chavire dans le sommeil et d’un navire qui s’enfonce; je sombrais avec elle, debout, comme une épave gorgée du silence des eaux profondes. (RS, p. 32-33)
Ce passage préfigure déjà l’action à venir : les dernières métaphores se rapportent au bateau (les verbes chavirer et sombrer, le navire qui s’enfonce, l’épave, les eaux profondes); elles annoncent déjà l’excursion à venir, le franchissement de la frontière par le bateau dirigé par Aldo. La carte a des pouvoirs singuliers, des pouvoirs hypnotiques sur le personnage ; elle l’enserre dans ses filets, dans ses mailles, elle le fait plonger comme une épave; et le jeune homme est quasiment aimanté, attiré par la frontière au point de vouloir la franchir avec le bateau lors d’une ronde de surveillance.
Si la première citation nous le montrait assis, la seconde le place debout : la fascination croît au point de conduire à l’hypnose, voire au sommeil; on a presque l’impression qu’Aldo dort debout. D’ailleurs, à bien y penser, c’est vraiment une histoire à dormir debout. Le désir de franchir l’interdit magique s’enracine dans la lecture de la carte, une lecture qui s’entoure de mystère, qui déclenche une sémiose infinie, une fascination sans bornes (7) ; le héros s’abîme dans sa lecture et les conséquences de ce geste seront redoutables, puisqu’il aura pour effet de plonger son pays dans la guerre, dans l’abîme. D’ailleurs, on a l’impression que le personnage n’a pas de volonté propre, qu’il subit une attirance, qu’il est agi, aimanté par l’espace, comme si la frontière était dotée d’un certain magnétisme, à l’instar du Nord pour la boussole. D’ailleurs, Gracq avoue dans un entretien avec Jean Carrière sa prédilection pour les lieux sous tension :
Mais la situation imaginative préférée d’un écrivain de fiction ne coïncide pas, dans mon esprit du moins, avec sa manière de vivre. Il y faut une tension liminaire, qui exige plus ou moins de dépaysement : il s’agit toujours, quant au lieu de l’action, et même s’il a des ressemblances avec des lieux familiers — d’un « pays où l’on n’arrive jamais » pour parler comme André Dhôtel. Confins, lisières, frontières, effectivement, sont des lieux qui m’attirent en imagination : ce sont des lieux sous tension, et peut-être cette tension est-elle — matérialisée, localisée — l’équivalent de ce qu’est la tension latente entre ses personnages pour un romancier psychologue : un stimulant imaginatif initial. Il arrive le plus souvent que les personnages, dans mes romans, soient eux-mêmes mis, par rapport à la société, dans une situation de « lisière », par une guerre, par des vacances, par une mise en disponibilité quelconque. De sorte que cette mise sous tension du lieu de l’action mobilise plus décisivement des personnages qui sont eux-mêmes momentanément désancrés : c’est du moins l’idée que je m’en fais. Le magnétisme ne meut qu’une aiguille dont le pivot est aussi immatériel, aussi lâche que possible; à l’origine, on la plaçait sur un fétu de paille flottant sur l’eau (8).
L’altérité se joue dans cette tension qui déporte vers le lointain, qui déstabilise, dans ce formidable effort qui nous pousse au-delà des limites du connu. Ligne rouge à ne pas franchir, la frontière n’est pas démarquée, puisqu’elle se situe au milieu de la mer. Rien ne permet de la distinguer sur le plan physique, c’est pourquoi il est si facile de la franchir. Quand Fabrizio, son second, lui demande pourquoi il veut aller si près de la côte ennemie, Aldo répond : « Ce que je voulais n’avait de nom dans aucune langue. Être plus près. Ne pas rester séparé. Me consumer à cette lumière. Toucher. » (RS, p. 212) On n’en saura jamais plus dans ce roman où l’indétermination règne en maître, au détour de chaque phrase. Impossible de connaître les réelles motivations du protagoniste, par exemple, a-t-il vraiment voulu déclencher cette guerre? S’est-il fait manipuler? Mais par qui? Vanessa, Danielo ou le mystérieux ambassadeur du Farghestan? De nombreux critiques se sont plu à interpréter ce récit troublant, dont l’espace a même été cartographié par l’un d’entre eux (9), mais ce qui demeure le plus intéressant, c’est justement le caractère indécidable de l’interprétation, qui repose en partie sur cette formidable fascination pour la frontière, cette tension qui déporte comme un aimant vers l’inconnu.
La frontière culturelle
Dans son introduction au volume qu’elle a dirigé sur les frontières et les seuils, Joëlle Ducos rappelle que la notion de frontière nous met au défi parce qu’elle possède de multiples rôles (10). Elle sert à affirmer une identité, à exercer un pouvoir, à réguler la circulation des personnes, à séparer les communautés, à codifier les rapports interculturels :
La frontière ne peut donc que susciter l’interrogation en raison de sa nature difficile à cerner alors qu’elle-même sert à manifester une identité ou un être en opposant deux zones. Elle s’impose comme signe marqué concrètement dans le paysage, qu’il s’agisse de haies, de barrières ou de bornes, mais elle est aussi chargée symboliquement : passer la frontière, c’est parfois une transgression qui, bien au-delà d’un signe politique, peut être aussi morale ou religieuse. C’est qu’elle n’est pas qu’un repère spatial, mais aussi l’indice d’un changement de civilisation, d’état et finalement d’identité (11).
Le besoin d’établir des frontières semble en effet inhérent à la formation de la culture, si l’on en croit le sémioticien russe Youri Lotman :
Toute culture commence par diviser le monde en « mon » espace interne et « leur » espace externe. Ce mécanisme est souvent intégré à la structure de la langue elle-même; toute langue possède un système de pronoms très révélateur de la manière dont chacun se considère à l’intérieur du groupe. On crée une frontière à partir d’une forme à la première personne « JE » : on distingue cet espace qui est le nôtre, le mien de cet espace autre, qui est le leur, qui est hostile, dangereux, chaotique (12).
Eux, ce sont les barbares, étymologiquement « ceux qui ne parlent pas notre langue », ceux que l’on ne comprend pas. Plutôt que de comparer les systèmes de signes, comme l’a fait la sémiotique structurale, ou de s’intéresser à la logique et aux catégories de signes, comme l’a fait la sémiotique peircéenne, Lotman se propose d’observer « l’espace sémiotique nécessaire à l’existence et au fonctionnement des différents langages » (13), autrement dit la sémiosphère, le milieu qui rend possible la création des signes, leur déchiffrement, ainsi que les échanges entre les êtres. La sémiosphère est pourvue d’un centre, d’un noyau dans lequel s’élaborent les principes fondamentaux et les valeurs d’identification de la communauté, ainsi que d’une périphérie, une zone frontière qui la met en relation avec les autres sémiosphères. Comme l’explique Lotman,
[l]a notion de frontière est ambivalente : elle sépare et unifie tout à la fois. Elle est toujours la frontière de quelque chose et appartient ainsi aux deux cultures frontalières, aux deux sémiosphères contiguës. La frontière est bilingue et polyglotte (14).
Plus le signe s’éloigne du centre de la sémiosphère, plus il perd de sa fixité; c’est pourquoi la périphérie est définie comme la « zone du dynamisme sémiotique » (15). Étant donné que la signification y devient flottante et que la frontière est poreuse, les signes se transforment lorsqu’ils se trouvent au contact d’une autre culture. En effet, la sémiosphère est soumise à deux forces contraires : l’une, centripète,obéissant à un principe de structuration et conduisant à l’établissement de normes, de coutumes, de lois, autrement dit favorisant le consensus, l’unité, l’homogénéité; l’autre, centrifuge, dirigée vers la périphérie, présentant quant à elle des langages moins organisés, des zones d’indétermination importantes, marginales, hétérogènes.
La zone frontalière est un espace marqué
par la tension, l’indétermination, l’hybridité,
la créolisation, le dynamisme sémiotique.
Ligne évoquant la limite, la séparation, le clivage, ou zone de confins que l’on peut explorer, voie sur laquelle on peut cheminer : ces deux manières d’envisager la frontière rejoignent deux conceptions de l’altérité — l’altérité binaire et l’altérité des frontières — qu’il me faut maintenant exposer.
L’altérité binaire
L’altérité binaire obéit à la logique du miroir, c’est-à-dire qu’elle est envisagée de manière univoque, comme une opposition tranchée entre le moi et ce qui est autre. La construction de l’altérité est régie par le mécanisme de l’opposition, de la différence. L’autre est défini comme ce que je ne suis pas, ou plutôt comme ce que je pense ne pas être. Cette image en miroir s’établit à partir d’un cadre de référence partagé par une communauté, à partir de certitudes bien ancrées dans la culture. Elle suppose l’établissement d’une loi, d’une habitude répondant principalement au besoin de se protéger de tout assaut extérieur. La peur de l’autre, l’incompréhension par rapport à ses coutumes, à ses langages culturels, nourrissent les préjugés, les clichés, les stéréotypes, ces images réductrices, ces schémas dans lesquels se trouvent réunis les traits que l’on considère comme étant ceux de l’étranger. L’opposition est nette, elle n’a pas d’effet sur le sujet qui appréhende l’altérité, car le signe emprisonne l’autre dans une différence établie d’avance. La frontière sert ici à marquer la différence : c’est par la négation de la différence que l’on s’affirme soi-même, comme l’ont bien montré François Hartog (16) à propos de la figure des Scythes chez les Grecs, ou encore Edward Saïd (17) et Thierry Hentsch (18) à propos de l’Orient imaginaire. Pourquoi l’Occident en est-il venu à inventer cet Autre menaçant, cet Orient à la fois cruel et voluptueux, réserve inépuisable de fantasmes, si ce n’est au bout du compte que pour parvenir à se définir lui-même, par le procédé de l’inversion ?
L’altérité des frontières
L’altérité des frontières conduit au contraire à explorer les zones frontalières entre les cultures, à s’aventurer dans l’opacité des signes, à s’immerger dans un univers où les signes sont flottants. La frontière n’est plus considérée comme un signe, un élément spatial réduit à une ligne, à une limite; c’est d’abord et avant tout un espace sémiotique dans lequel se croisent des langages provenant de sémiosphères différentes. La zone frontalière n’a pas de contours définis : c’est un espace marqué par la tension, l’indétermination, l’hybridité, la créolisation, le dynamisme sémiotique, puisque de nouveaux langages voient le jour grâce à ces chocs culturels nés de la rencontre.
Pour observer ce type d’altérité, je propose d’examiner deux situations de frontières décrites dans le récit de voyage de Nicolas Bouvier, L’usage du monde, publié en 1963. La première relate l’arrivée dans un village tzigane situé à la frontière entre la Yougoslavie et la Hongrie : « […] il existe encore quelques rares villages de Tziganes cachés au fond des provinces qui longent la frontière hongroise. Villages de glaise et de paille qui apparaissent et disparaissent comme par enchantement. » (19)
L’arrivée des deux étrangers — Nicolas Bouvier voyage avec son ami Thierry Vernet, un Suisse comme lui — suscite tout d’abord la méfiance : « Lorsqu’on apparut sur la porte, la musique s’arrêta net. Ils avaient posé leurs instruments et nous fixaient, stupéfaits et méfiants. » (UM, p. 43) Puis le récit nous fait entrevoir le chatoiement des langues et les délices de la traduction : « Entre les tournées, nous parlions; en français à Mileta qui s’adressait en serbe au patron qui traduisait en hongrois aux Tziganes, et retour. » (UM, p. 43) En plus de ces passeurs que sont les différents traducteurs se succédant tout au long du récit, une pratique culturelle en particulier permet de nouer des relations avec les gens, de passer de la méfiance à l’amitié : la musique. Il faut dire que Bouvier se promène avec du matériel pour enregistrer afin de collecter des musiques partout où il passe. Il découvre très vite les vertus de cette pratique sémiotique permettant de dépasser les barrières linguistiques et identitaires :
Ici [à Prilep, en Macédoine], comme en Serbie, la musique est une passion. C’est aussi un « Sésame » pour l’étranger : s’il l’aime, il aura des amis. S’il enregistre, tout le monde, même la police, s’emploiera à racoler des musiciens. (UM, p. 82)
Si la frontière n’est jamais transgressée, si elle ne suscite pas de fascination comme chez Gracq, en revanche, le récit met en évidence plusieurs manières originales de désamorcer les tensions liées à la frontière. La traversée de la frontière iranienne donne ainsi lieu à une véritable scène — on sait que le récit de voyage a souvent recours à la « théâtralisation du réel » (20). Quand ils arrivent à la douane, l’officier leur apprend qu’ils doivent avoir un soldat pour escorte pour aller jusqu’à Maku, et qu’il va leur en trouver un « tout petit ». Et, comme de fait, il revient avec un nain :
Nous assîmes le nabot sur le capot. Je conduisais très lentement sur une piste étroite et moelleuse. Thierry, penché sur le siège du passager, allumait des cigarettes pour le soldat qui chantait, les yeux mi-clos, une petite ritournelle, et émettait par bouffées une forte odeur de mouton. (UM, p. 126)
La scène a de quoi faire sourire, aussi bien en raison des jeux sonores que de la posture prise par les personnages dans la voiture minuscule et du caractère nonchalant du soldat qui ne correspond en rien à l’image qu’on peut se faire d’un militaire chargé de la protection ou de la surveillance des voyageurs. Une fois l’étape franchie, le soldat descendu du capot, les deux étrangers ne parviennent plus à déchiffrer les panneaux, ils ont la sensation d’avoir changé de monde :
Une galette mince comme du journal avait remplacé le pain turc; et le petit lait, le café. Plus moyen de déchiffrer une enseigne ou une borne militaire; c’était l’écriture persane qui marche à reculons. Le temps aussi : en une nuit nous avions passé du vingtième siècle du Christ au XIVe de l’Hégire, et changé de monde. (UM, p. 126-127)
Au lieu de créer des difficultés, cette altérité linguistique, temporelle et religieuse devient le creuset d’une réflexion, les découvertes se succédant les unes aux autres avec leur lot de fascination pour les cultures rencontrées. Les voyageurs feront d’ailleurs inscrire des vers du poète Hafiz sur la portière de leur Fiat Topolino, faisant de cette dernière un nouveau sésame dans chacun des villages qu’ils traverseront (21). Placés à la croisée des langues et des cultures, ils se situent bel et bien à la frontière. La ville de Mianeh devient l’exemple même du bilinguisme de la frontière :
Mianeh est aussi la frontière de deux langues : en deçà, l’azeri où l’on compte ainsi jusqu’à cinq : bir, iki, ütch, dört, bêch; au-delà, le persan : yek, do, sé, tchâr, penj. Il n’y a qu’à comparer ces séries pour comprendre avec quel plaisir l’oreille passe de la première à la seconde. L’azeri […] est une langue âpre, faite pour la bourrasque et la neige; aucun soleil là-dedans. Tandis que le persan : chaud, délié, civil, avec une pointe de lassitude : une langue pour l’été. (UM, p. 232-233)
Le plaisir sensuel, celui de l’oreille qui capte la diversité des sons, de même que les associations libres assez étonnantes entre la langue et l’environnement l’emportent sur les obstacles à la compréhension dégénérant en conflit, souvent mis en exergue dans les scènes de frontière.
La frontière apparaît donc comme un élément clé dans la construction de l’espace, aussi bien en ce qui concerne l’espace réel que l’espace de la fiction. C’est une ligne de séparation entre des territoires qui évolue selon divers degrés de fixation, ainsi que l’explique Raffestin : la frontière est définie grâce à des négociations, délimitée grâce à un tracé sur la carte et démarquée grâce à des bornes concrètes sur le territoire. Plus le degré de fixation augmente, plus il devient difficile de franchir la frontière.
La fascination pour la carte dans le roman de Julien Gracq Le rivage des Syrtes ne se comprend que dans la mesure où il s’agit justement d’une ligne qui n’a pas donné lieu à une fixation dans le territoire. La frontière ayant été établie au beau milieu de la mer qui sépare les deux pays ennemis, son tracé suscite un intérêt grandissant chez le personnage. La lecture de la carte met en valeur la dimension esthétique, mythique, symbolique et exotique de la frontière; celle-ci fascine au point de provoquer un véritable envoûtement et de créer une atmosphère fantastique.
L’altérité se joue dans cette tension
qui déporte vers le lointain, qui déstabilise,
dans ce formidable effort qui nous
pousse au-delà des limites du connu.
Cela dit, la transgression de la frontière n’est pas la seule manière d’entrer en contact avec l’autre. En proposant de la concevoir comme une zone, comme un espace de confins dans lequel les signes provenant de différentes cultures coexistent, Lotman met en évidence les deux rôles complémentaires de la frontière : séparer et unir. Ce n’est qu’à partir du moment où l’on se dégage d’une conception de l’altérité fondée sur la binarité (Soi/Autre) que l’on peut envisager l’altérité des frontières. L’usage du monde de Nicolas Bouvier donne l’occasion d’examiner des scènes caractéristiques de cette forme d’altérité et de comprendre comment certaines pratiques culturelles, comme la musique ou la poésie, procurent des sésames permettant de dépasser les obstacles liés à la compréhension. L’écriture transforme le voyage réel à l’aide de stratégies théâtrales afin de désamorcer les tensions liées à la traversée des zones réputées dangereuses. Le récit devient ce lieu où les langues les plus hétérogènes se côtoient, à l’endroit et à reculons, où les rencontres se font et se défont, où la musique fuse et ensorcelle, donnant au lecteur l’occasion d’explorer à son tour les frontières du connu, de retrouver ce plaisir sans mélange qui émane de la marche, avec la route qui attire comme un aimant vers un horizon à jamais insaisissable.
Rachel Bouvet
Notes :
(1) Thierry Hentsch, La mer, la limite, Montréal, Héliotrope, 2006, p. 19.
(2) Kenneth White, Limites et marges, Paris, Mercure de France, 2000, p. 8.
(3) Claude Raffestin, « Éléments pour une théorie de la frontière », Diogène, vol. 34, no 134, 1986, p. 10.
(4) Vérane Partensky, « Les desseins de la carte : de Jules Verne à Borges », dans J. Ducos [dir.], Frontières et seuils, EIDÔLON, Cahiers du Laboratoire Pluridisciplinaire de Recherches sur l’Imaginaire appliquées à la Littérature (LAPRIL), Bordeaux, no 67, p. 177.
(5) Étant donné son statut particulier d’écrivain-géographe, Gracq a intéressé autant les littéraires que les géographes. Parmi ces derniers, Jean-Louis Tissier (1981, 1982, 1988) a consacré plusieurs articles à la dimension géographique de son œuvre; Marc Brosseau a quant à lui analysé « Le style-géographe » dans son livre Des romans-géographes (1996). L’espace romanesque gracquien a été étudié notamment par Michèle Monballin (Gracq, création et récréation de l’espace, 1987), Michel Murat (L’enchanteur réticent. Essai sur l’œuvre de Julien Gracq, 2004) et Pierre Jourde (Géographies imaginaires de quelques inventeurs de mondes au XXe siècle : Michaux, Tolkien, Gracq, Borges, 1991).
(6) Julien Gracq, Le rivage des Syrtes, Paris, José Corti, 1951, p. 32. Désormais, les références à ce roman seront indiquées entre parenthèses à la suite de la citation, précédées de la mention RS.
(7) Au sujet des caractéristiques de la lecture des cartes géographiques, voir l’ouvrage de Christian Jacob, L’empire des cartes, Approche théorique de la cartographie à travers l’histoire, Paris, Albin Michel, 1992.
(8) Jean Carrière, Julien Gracq — Qui êtes-vous ?, Lyon, La manufacture, 1986, p. 171.
(9) Yves Lacoste, « Le rivage des Syrtes, un roman géopolitique », Hérodote, no 44, 1987, p. 8-37.
(10) Joëlle Ducos, « Présentation », dans J. Ducos [dir.], Frontières et seuils, EIDÔLON, Cahiers du Laboratoire Pluridisciplinaire de Recherches sur l’Imaginaire appliquées à la Littérature (LAPRIL), Bordeaux, no 67, 2004, p. 8-13.
(11) Ibid., p. 8.
(12) Youri Lotman, La sémiosphère, traduit par A. Ledenko, Limoges, Presses universitaires de Limoges, 1999, p. 30.
(13) Ibid., p. 10.
(14) Ibid., p. 30.
(15) Ibid., p. 26.
(16) François Hartog, Le miroir d’Hérodote. Essai sur la représentation de l’autre, Paris, Gallimard, 1991.
(17) Edward Saïd, L’orientalisme. L’Orient créé par l’Occident, traduit par C. Malamoud, Paris, Seuil, 1980.
(18) Thierry Hentsch, L’Orient imaginaire. La vision politique occidentale de l’Est méditerranéen, Paris, Éditions de Minuit, 1988.
(19) Nicolas Bouvier, L’usage du monde, Paris, Payot, coll. « Petite bibliothèque Payot/Voyageurs », 2001 [1963] , p. 40. Désormais, les références à ce texte seront indiquées entre parenthèses à la suite de la citation, précédées de la mention UM.
(20) Voir entre autres l’ouvrage collectif dirigé par Marie-Christine Gomez-Géraud et Philippe Antoine, Roman et récit de voyage, Paris, Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, coll. « Imago Mundi », 2001.
(21) L’édition des Œuvres complètes dans la collection « Quarto » chez Gallimard (2004) comprend une série de photos prises par Nicolas Bouvier, dont une montrant la voiture avec les fameuses inscriptions sur la portière (« Thierry Vernet au col de Kodjak (Khujak Pass) Pakistan, 1954 »).
Bibliographie :
Bouvier, N. (2001 [1963]). L’usage du monde, Paris, Payot, coll. « Petite bibliothèque Payot/Voyageurs ».
Bouvier, N. (2004). Œuvres, Paris, Gallimard, coll. « Quarto ».
Brosseau, M. (1996). Des romans-géographes, Paris, L’Harmattan.
Carrière, J. (1986). Julien Gracq — Qui êtes-vous ?, Lyon, La manufacture.
Ducos, J. (2004). « Présentation », dans J. Ducos [dir.], Frontières et seuils, EIDÔLON, Cahiers du Laboratoire Pluridisciplinaire de Recherches sur l’Imaginaire appliquées à la Littérature (LAPRIL), Bordeaux, no 67, p. 8-13.
Gomez-Géraud, M.-C. et P. Antoine [dir.] (2001). Roman et récit de voyage, Paris, Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, coll. « Imago Mundi ».
Gracq, J. (1951). Le rivage des Syrtes, Paris, José Corti.
Hartog, F. (1991). Le miroir d’Hérodote. Essai sur la représentation de l’autre, Paris, Gallimard.
Hentsch, T. (1988). L’Orient imaginaire. La vision politique occidentale de l’Est méditerranéen, Paris, Éditions de Minuit.
Hentsch, T. (2006). La mer, la limite, Montréal, Héliotrope.
Jacob, C. (1992). L’empire des cartes. Approche théorique de la cartographie à travers l’histoire, Paris, Albin Michel.
Jourde, P. (1991). Géographies imaginaires de quelques inventeurs de mondes au XXe siècle : Michaux, Tolkien, Gracq, Borges, Paris, José Corti.
Lacoste, Y. (1987). « Le rivage des Syrtes, un roman géopolitique », Hérodote, no 44, p. 8-37.
Lotman, Y. (1999). La sémiosphère, traduit par A. Ledenko, Limoges, Presses universitaires de Limoges.
Monballin, M. (1987). Gracq, création et récréation de l’espace, Bruxelles, De Boeck-Wesmael.
Murat, M. (2004). L’enchanteur réticent. Essai sur l’œuvre de Julien Gracq, Paris, José Corti.
Partensky, V. (2004). « Les desseins de la carte : de Jules Verne à Borges », dans J. Ducos [dir.], Frontières et seuils, EIDÔLON, Cahiers du Laboratoire Pluridisciplinaire de Recherches sur l’Imaginaire appliquées à la Littérature (LAPRIL), Bordeaux, no 67, p. 175-186.
Raffestin, C. (1986). « Éléments pour une théorie de la frontière », Diogène, vol. 34, no 134, p. 3-21.
Saïd, E. (1980). L’orientalisme. L’Orient créé par l’Occident, traduit par C. Malamoud, Paris, Seuil.
Tissier, J.-L. (1981). « De l’esprit géographique dans l’œuvre de Julien Gracq », L’espace géographique, no 1, p. 50-59.
Tissier, J.-L. (1982). « La carte et le paysage : les affinités géographiques », dans G. Cesbron [dir.], Julien Gracq (Actes du colloque international d’Angers), Angers, Presses de l’Université d’Angers, p. 96-104.
Tissier, J.-L. (1988). « Où la fiction dépasse la géographie », dans Paysages et sites dans l’œuvre de Julien Gracq, Paris, José Corti et Maison du livre et des écrivains de Montpellier, s. p. White, K. (2000). Limites et marges, Paris, Mercure de France.
White, K. (2000). Limites et marges, Paris, Mercure de France.