Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes

Histoire de l’uniforme des douaniers musiciens (1791-1983)

Mis en ligne le 1 juillet 2021

Tambour, 1er Empire, E. Fort.

Il faut d’abord s’entendre sur ce que l’on appellerait « Musique des douanes ». Dès l’Empire, certaines légions – pour les plus importantes – se dotent de clairons et tambours. Les Bataillons douaniers se dotent de « corps de fanfare ». Les grandes circonscriptions douanières (Le Havre et Marseille notamment) conserveront des tambours et clairons – voire des harmonies – pour rythmer la vie en caserne. Ce n’est qu’après la Seconde Guerre mondiale que naîtra véritablement une musique des douanes, créée sur celle de la caserne de Marseille.

 

Uniformologiquement, dresser un panorama certain est une tâche ardue. D’abord parce que les sources précises ont parfois disparu. Enfin parce que, comme les troupes que les agents – souvent anciens militaires – côtoient, les douaniers ont parfois tendance à la fantaisie.

 

 

I – Des clairons et tambours…

 
 

La Révolution, comme l’Ancien Régime avant elle, ne se soucie pas d’attribuer pas d’attribuer immédiatement un uniforme aux agents des douanes, qui s’identifient à l’aide d’une plaque en argent portée sur un baudrier.

 
 

C’est un arrêt du 25 pluviose An VIII (14 février 1800) qui s’occupe de prescrire aux agents des douanes un uniforme en le détaillant. L’uniforme général se compose d’un habit vert, d’un gilet rouge, d’une culotte verte et d’un chapeau « à la française ». Aucune disposition spécifique n’est réservée aux tambours ou clairons, étant précisé que le seul attribut distinctif créé par cet arrêté est un collet jaune, arboré par les officiers.

 
 

L’arrêté du 7 frimaire An X (28 novembre 1801) qui « détermine l’uniforme du directeur général, des Administrateurs et des employés des douanes » reprend l’uniforme de 1800, tout en détaillant les insignes propres à chaque grade. Là encore, aucune disposition ne fait référence aux musiciens.

 
 

Il faut dès lors se reporter à l’iconographie – et notamment à l’étude d’Ernest Fort – pour constater que ceux-ci ne disposent d’aucun attribut particulier, si ce n’est un plumet représenté tantôt comme tricolore, tantôt bicolore .

 
 

Tambour, 1er Empire, Légion du Rhin, E. Fort d’après des croquis originaux

Une autre illustration reproduite par le même Ernest Fort (1) mérite néanmoins qu’on s’y attache. Il représente un groupe de trois « douaniers du Rhin », dont un tambour. Outre le shako, qui s’impose dans la seconde moitié de l’Empire, celui arbore un galon de livrée arboré par les clairons et tambours des régiments. Il convient de noter que, plus que toutes les autres, les légions des douanes stationnées en Allemagne seront propres à adopter des fantaisies le rapprochant des autres unités militaires. On rappellera que c’est la Légion de Hambourg qui arborera, comme fantaisie, un passepoil garance.

 
 

Sans qu’aucun règlement douanier ne l’aborde directement, l’uniforme des clairons et tambours adapte à la suite de l’Empire les évolutions du règlement militaire, et notamment la réforme de l’uniforme de 1827. Les clairons et tambours arborent ainsi un galon tricolore au collet et aux parements de manche. Ces attributs seront adaptées aux différentes tenues adoptées par les douaniers au long du XIXè siècle : habit droit ou frac vert (ordonnance du 30 juin 1835) puis tunique à compter de 1852 (circulaire du 6 mars). Ernest Fort représente ainsi de nombreux clairons et tambours arborant le galon spécial tricolore au collet et aux parements de manche .

 
 

Tambour, règlement de 1852, E. Fort

Par décret du 2 avril 1875, l’organisation militaire des douanes est réformée. Une Lettre commune du 11 juin 1875 en résumé les conséquences. En rappelant que les compagnies des bataillons disposent de clairons et, à défaut, de tambours, elle prévoit spécifiquement le port de marques distinctives pour ceux-ci : « les clairons et tambours auront au collet les galons des collets et tambours d’infanterie ».

 
 

Ce galon est d’ailleurs parfaitement visible sur l’ensemble des musiciens – officiers compris, pour le seul collet – du détachement havrais à la fin du XIXème siècle. Les préposés et sous-officiers portent tous la tunique vert finances adoptée en 1852, modifiée en 1874, et les officiers le dolman adopté en 1886.

 
 

Musique des douanes du Havre à la fin du XIXè s., droits S. Lemaître


 
 

Clairon des douanes en 1910 (détail), E. Fort

En 1895, on se réfère, dans les cahiers des charges relatives aux adjudications, au « galon de laine à trois couleurs des clairons » comme arborant le parement de manches des capotes. Pour la tunique, il figure au collet mais est également posé sur les manches en chevron.

 
 

L’uniforme est profondément réformé en 1903, la tunique verte étant remplacée en service ordinaire par un veston bleu à double boutonnage, assez semblable au paletot de l’infanterie de marine. Pourtant, la circulaire du 28 novembre n’aborde sur aucun point les attributs des clairons et tambours.

 
 

Ernest Fort représente un curieux clairon en 1910. Si ce-dernier porte les insignes propres à sa fonction sur le veston modèle 1903, il porte de manière encore plus surprenante une fausse jugulaire arborant le même insigne.

La Première Guerre mondiale verra disparaître les fonctions de clairons et tambours. La réforme de l’uniforme opérée en 1921 semble en tout cas avoir mis un terme au port du galon tricolore.

 
 

II – … à la musique des douanes

 
 

Musique des douanes, 1959, A. Pommier/F. Roche/DGDDI

Auto-dissoute en 1910, une Harmonie se reconstitue à la caserne de Marseille en 1942. Initiative locale, les agents portent leur tenue de service ordinaire, à savoir un veston à col aiglon, adopté depuis 1938. Les agents provenant à la fois des brigades terrestres et maritimes, ils arborent soit le képi avec le cor et la grenade, soit la casquette à l’ancre de marine. Ces deux insignes se retrouvent d’ailleurs sur les flammes des instruments.

 
 

Musique des douanes, 1959, A. Pommier/F. Roche/DGDDI

La musique de Marseille devient dès la fin de la Seconde Guerre mondiale la musique de l’administration des douanes. Les sources textuelles ne nous sont pas connues, tout du moins l’uniforme des musiciens des douanes ne semble-t-il jamais avoir donné lieu à une définition par décision administrative nationale.

 
 

L’iconographie permet néanmoins de distinguer deux tenues portées successivement par les musiciens. Plusieurs clichés pris à l’occasion d’une réception en 1959 nous permettent de distinguer deux attributs singuliers : les musiciens portent sur la manche gauche une lyre, le tambour major portant lui un galon semblant être tricolore. On aperçoit également un drapeau spécifique à la musique, dont la hampe est surmontée d’une lyre.  Dans les années 1970, la vareuse de service courant n’est plus agrémentée de cette insigne.

 
 

Musique des douanes, Marseille, 1983, F. Roche/DGDDI

L’adoption d’une tenue allégée en 1977, avec le port de la seule chemise et de la cravate, s’accompagne néanmoins pour les musiciens du port d’épaulettes spécifiques. Celles-ci ne reprennent aucune marque distinctive de grade mais arborent une lyre en cannetille.

 
 
 

Xavier Rauch

 
 
 
 


(1) Ernest Fort (1898-1957) est connu pour ses aquarelles représentant des douaniers en tenue. Son oeuvre, presque intégralement consacrée à la douane, constitue une  précieuse histoire de l’uniforme des douanes, de 1801 à 1918.

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