Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes
Ernest Fort: « Un manuscrit sur la douane »
Il y aura (bientôt) cinquante ans que la rédaction de « La Vie de la Douane » prenait l’initiative de publier dans chacune ses éditions une des planches d’uniforme d’Ernest Fort. Nous reproduisons ici l’article intitulé « E. Fort: Un manuscrit sur la douane » qui annonce cette première parution et qui rend un hommage appuyé à son auteur. Sont également reproduits le fac-similé de l’introduction d’E. Fort à son ouvrage en 1918 et l’illustration sélectionnée.
I. La diffusion de la première planche par « La Vie de la Douane »
« Un manuscrit sur la douane »
En inaugurant une série de reproductions destinée à retracer l’évolution de l’uniforme douanier de 1790 à la fin du XIXe siècle, « La Vie de la Douane » présente à ses lecteurs l’introduction à l’ouvrage d’où sont extraites ces illustrations.
Propriété du musée de l’Ecole Nationale des Douanes (END) de Neuilly, cet important volume est l’oeuvre de M. Fort, fils et petit-fils de douanier et bibliothécaire à Bayonne en 1917.
L’auteur y fait preuve à la fois de « science » et de « conviction » dans la recherche comme dans la composition.
De la science, il démontre tout au long des 240 pages qu’il sait parfaitement puiser dans les archives les plus variées et les plus rares: ordonnances, décrets, arrétés pour y trouver leur caractéristique commune: la douane. Au talent de l’archiviste, il allie l’aisance et la précision du portraitiste. Une centaine de dessins, portraits, tableaux donnent une image à la fois claire et attrayante de la tenue des agents de l’époque. L’armement, les insignes, l’uniforme sont soigneusement étudiés avec une rigueur et un sens du détail qui ne laissent aucun doute quant à l’authenticité des sources utilisées. Au delà de ces illustrations et de ces textes, on devine, en filigrane, les orientations successives que dut connaître notre Administration au cours du XIXe siècle.
Il fallait également beaucoup de « conviction », ainsi qu’en témoigne le style: « l’uniforme des douaniers qui rappelle tant de courage, d’honnêteté, de sacrifices, de privations et aussi d’honneurs… ».
Les notions de devoir, de sacrifice, d’héroïsme même, témoignent de la conscience aigûe du service de l’Etat qui était celle de ces agents et la vigueur de cette jeune administration. Loccasion nous est donnée de saisir un peu de l’espritqui a caractérisé cette époque. Sans doute l’enthousiasme de l’auteur altère-t-il quelque peu la rigueur et l’objectivité du fait historique, il n’en témoigne pas moins d’un profond sentiment d’admiration pour les agents du service des douanes. Qu’importe que ce style nous paraisse suranné! Autres temps, autres moeurs… « Et combien sont morts sous la balle meurtrière d’un rodeur de frontière! » … « le douanier? Mais on l’appelle encore pour s’pposer à ‘entrée du produit le plus terriblequ’envoie l’étranger: son armée ».
« le nombre de douaniers tombés sous le coup des guerres de Napoléon, puis de 1815 à 1918, suffira pour témoigner de leur héroisme… ».
L’intention première de l’auteur émane d’un « vif sentiment de piété filiale » auquel vient se joindre « la tentation de faire revivre, à travers les époques, père et grand-père qui portèrent l’uniforme ». Sa recherche procède donc avant tout d’un souci de retrouver l’image d’un passé qui touche de très près à sa vie et de donner un documentaire plus qu’un ouvrage historique.
Outre la valeur historique que confère à cette étude la rareté des documents, la grande variété ainsi que la quantité des dessins de la main même de l’auteur, témoignent d’un incontestable talent artistique.
Aussi, l’intérêt actuel de l’ouvrage est non seulement de constituer un important recueil de textes et de documents, mais également de permettre à chacun de saisir avec plus de vigueur la personnalité du douanier, à qui l’on demande non seulement d’assurer la protection des frontières, mais également de participer activement à la lutte militaire.
Par la reproduction d’uniformes qu’elle entreprend aujourd’hui de publier, « La Vie de la Douane » va essayer de faire revivre un peu du passé méconnu de notre Administration en permettant à chacun de mieux apprécier toute la richesse de l’ouvrage de M. Fort.
La rédaction de « La Vie de la Douane »
II. Ci-dessous copie de la reproduction intégrale de l’introduction d’E. Fort à son ouvrage de 230 pages; pour en faciliter la lecture, nous reproduisons également à la suite le texte de l’auteur en version dactylographiée:
Ci-dessous le texte de l’auteur en version dactylographiée:
Introduction
Il n’existait aucun recueil complet sur la douane avant que ne lui fussent consacrés les dessins et les pages de ce manuscrit. Pourquoi cette indifférence ou cet oubli? Ce n’est point que ce corps ne présentât pas autant d’intérêt que tout autre corps de l’armée française mais aucune étude préalable ne facilitant les recherches, personne avant nous ne voulut entreprendre cette étude, du reste bien sommaire. Notre manuscrit, lui même, ne fut, sans doute, jamais venu si un vif sentiment de piété filiale ne l’eut inspiré aussi bien, la douane, au sein de laquelle nos parents furent de longues années de service, nous offrit-elle la tentation de la faire revivre, par le pinceau, à travers les époques où, père et grand-père en portèrent l’uniforme.
Il existe d‘autres exemplaires de ce manuscrit où, tout au moins, s’en rapprochant. L’administration des douanes, son directeur général,Mr Delanney, un de ses administrateurs Mr Moulié, le prince Victor Napoléon et quelques rares collectionneurs firent, en 1910, l’acquisition des essais que nous fîmes connaître alors. Aucun de ces manuscrits ne présente la valeur documentaire de celui-ci, résultat de plus longues et de plus minutieuses recherches. Ils sont certes sans prétentions artistiques les dessins de ce recueil; le texte lui même n’est point soigné dans sa forme littéraire mais dessins et texte émanent de sources documentaires si sûres et si bien contrôlées qu’ils peuvent être acceptés en toute sincérité, en toute confiance.
Je dédie ce manuscrit à la mémoire de mon père qui aime passionnément la douane dont il révétit l’uniforme de 1838 à 1878.
Signé: E. Fort
1er janvier 1918
III. Ci-dessous copie de la première planche d’Ernest Fort reproduite par « La Vie de la Douane » et diffusée dans son numéro 149 d’octobre 1971, celle représentant un « Préposé de 1856 à 1862 d’après la circulaire du 6 février 1845 (ordonnance de 1845).
La Vie de la Douane
Journal de la formation professionnelle
N° 149 – octobre 1971