Charles Alfred Barthélémy, Marche des Douaniers (Douanilaria), 1900 (12/50)
Dans sa préface à la brochure reproduisant le recueil poétique intitulé “Douanilaria” publiée par l’AHAD en 2021, Roland Giroire donnait les précisions suivantes sur la vie et la carrière de son auteur, Charles Alfred Barthélémy :
“L’examen des archives a révélé un «Charles Alfred Barthélémy né le 30 octobre 1867 à Artaise le Vivier (08), mesurant 1,60m, de bonne complexion, de belle représentation. Il fut d’abord affecté aux brigades de Rocroi, Monthermé, et Vireux. Fait prisonnier en septembre 1914 lors de la défense de Givet, il sera déporté en Allemagne jusqu’en 1918. On l’affecte alors, dans les brigades du Cap d’Ail et de Nice. Il prendra sa retraite en 1921. Il était l’époux de Marie Noizet née à Maubert Fontaine dans les Ardennes».
Douanilaria dédié à l’inspecteur auprès duquel servait, vers 1900, le brigadier Barthélémy, est une fresque de la vie des douaniers de l’époque. Teinté d’humour, de poésie, l’ouvrage est selon Y. Hureaux un véritable «trésor recopié à la plume d’oie dans une calligraphie parfaite et orné de lettrines, de fleurons, de culs de lampe d’un raffinement exquis, et l’intéressé y a consacré une bonne partie de sa retraite».
Le récit est vivant, fleuri et passe en revue de nombreux aspects de la vie douanière et du service. Les critiques voilées avec humour, les difficultés du métier soulignées, le sens du devoir toujours mis en avant, ponctuent le texte.”
Marche des Douaniers (Douanilaria), 1900
Nous sommes les hardis douaniers
Enfants perdus de la frontière ;
Au combat jamais les derniers !
Sur la penthière
Allons gaiement
Et doucement,
L’œil aux aguets,
Tenons-nous prêts
Le cœur plein d’espérance,
C’est pour la France !
De nuit, de jour, dans les chemins
On nous voit prêts au sacrifice,
Et des contrebandiers malins
Déjouer tous les artifices ;
Qu’il fasse chaud, qu’il fasse froid,
L’été, l’hiver, rien ne nous lasse,
Nous avons le grand ciel pour toit
Et pour couverture la glace !
Dans les Alpes aux monts neigeux
Dans les Vosges infortunées
Le long des lacs marécageux
Et dans les « ports » des Pyrénées
Sur les rivages de la mer,
Partout où le devoir commande
On nous aperçoit humant l’air
Plein d’effluves de contrebande !
Ah ! qu’il est beau le livre d’or
Le beau livre d’or de la Douane !
Après chaque nom on lit : « Mort.
« Mort à Sedan, mort à Modane »
« Mort au Gabon, mort dans les bois »
Terrassés par maintes épreuves ;
Et chaque année et chaque mois
S’augmente le nombre des veuves.
Verseur d’or dans les grands tonneaux
Pareils à ceux des Danaïdes
Que l’état fait avec nos peaux
Nous ne savons qu’être intrépides !
Mal payés, nous n’avons accès
Qu’aux endroits où l’on bûche, l’on cogne !
Enfin nous sommes des Français
Ne boudant point à la besogne !…
Mais bientôt nous verrons le jour
Que ce soit en juin ou décembre
Où l’on dira : « Chacun son tour »
« Si l’on parlait d’eux à la Chambre ! »
Notre Directeur Général
Viendra chercher dans nos familles
Nos fils – où donc serait le mal ! –
Pour les marier à ses filles.
