Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes
Aux origines de la formation professionnelle douanière
Durant une longue partie de son histoire, l’administration française, y compris bien entendu la direction générale des douanes, recrutait ses cadres suivant la technique du surnumérariat. Il s’agissait, comme l’étymologie le précise, d’employés en excédent non titularisés, non rémunérés, dans l’expectative d’un recrutement définitif pour lequel les relations personnelles l’emportaient souvent sur les mérites déployés au cours de cette période, non limitée dans le temps, d’attente d’ajustements des effectifs.
L’abandon de ce système au bénéfice d’un recrutement par concours ne se précisera qu’au tout début du siècle : 1907, 1908, 1913 sont les dates qui fixent les premières évolutions en ce sens pour les différents concours d’inspecteur, contrôleur rédacteur, vérificateur, à l’exception de la sélection interne au grade de lieutenant qui s’organisa en concours dès 1882.
Cette réforme essentielle traversa sans grande modification la première moitié du siècle. Pourtant, les progrès considérables dans la qualité et l’impartialité du recrutement qu’apportaient les concours n’étaient pas accompagnés du même effort en matière de formation.
Tout comme au temps du surnumérariat, la connaissance de la réglementation et de la technique administratives était pour l’essentiel laissée à l’initiative de chacun pour acquérir ou transférer l’expérience.
Certes, l’administration favorisait la publication de revues telles que Les Annales des Douanes où le service pouvait prendre connaissance des évolutions de la matière administrative. La rédaction d’ouvrages de base très complets par un certain nombre de fonctionnaires compétents (Le Pallain, Le Saint-Jour…) participait également à cette aide apportée à la formation professionnelle des agents, mais la formation initiale pour tous à l’issue des concours pour le recrutement manquait encore, malgré les idées en ce sens qui se faisaient jour.
Le service des brigades, le premier, fut doté d’une école d’application destinée à la formation initiale des jeunes préposés recrutés.
Le principe en fut arrêté par décision ministérielle du 24 mars 1936 qui fixait également le lieu d’implantation de cet établissement à Montbéliard : l’Ecole devait s’ouvrir le 1er mars 1938.
Pour le service des bureaux existait également une structure de formation spécialisée qui s’adressait aux « Vérificateurs ».
Ces fonctionnaires des douanes chargés, avec un certain prestige, de mener les opérations de visite des marchandises en vérifiant bien évidemment que leur déclaration respectait précisément l’ensemble de la réglementation douanière et tout particulièrement les règles du classement tarifaire, étaient sélectionnés à la suite du « concours de la visite » auquel pouvaient se présenter les Contrôleurs justifiant de cinq années d’ancienneté.
Le succès au concours était suivi d’une formation technique d’une durée de six à huit mois qui était dispensée dans les locaux de la direction de Paris, là où se trouve actuellement l’Interrégion de l’Île-de-France, rue Yves Toudic.
Néanmoins, ces premières formations spécialisées et limitées dans le temps ne constituaient pas encore un plan précis développant l’ambition d’apporter par un enseignement élargi les connaissances professionnelles nécessaires à l’ensemble des jeunes agents recrutés.
Il faudra attendre le grand souci de rénovation de l’administration française exprimé et concrétisé au lendemain de la Libération pour que la formation dont il avait été souvent parlé jusque-là devienne un impératif qu’il convenait d’organiser.
Les progrès significatifs réalisés par l’administration sont en général le résultat de la rencontre d’idées ayant mûri au point de s’être imposés et d’un homme ou d’une équipe d’hommes ayant la pugnacitié nécessaire pour les faire aboutir en bousculant les habitudes.
La nomination de M. Georges Degois en qualité de Directeur Général des Douanes, le 7 février 1947, devait incontestablement hâter la mise en place de la formation professionnelle des inspecteurs et la création de l’Ecole Nationale des Douanes à Neuilly-sur-Seine.
Albert LAOT
Extrait de l’ouvrage : Histoire de l’Ecole Nationale des Douanes de Neuilly, AHAD / Nouvelle Librairie de France (1995)