Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes

 Les différentes motos de l’administration des douanes (1960-2010)

Mis en ligne le 1 mars 2022

 

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Il convient de rappeler qu’au milieu des années 50, l’administration des douanes s’était dotée de motos de la marque anglaise BSA (Birmingham Small Arms). Trois modèles de cette marque allaient se succéder  (tous de couleur noire).

 

 

Le premier modèle sera la BSA GA7, équipée d’un moteur bi-cylindre TWIN de 500 Cm3 d’une puissance de 30 Cv, boite de vitesse séparée 4 rapports, transmission par chaîne, freins à tambours avant et arrière simple came, un poids en ordre de marche d’environ 170 kg et d’une vitesse de pointe de 145 Km/h. frein à tambour sur les deux roues l’équipement pour l’administration sera une selle suspendue de type « Pillion » d’un porte-bagage avec support de sacoches en cuir souple de couleur noire.

 

Moto BSA GA7

 

Le deuxième modèle sera la BSA A50, ce modèle sera juste amélioré au niveau de la boîte de vitesse, toujours à 4 vitesses mais intégrée dans le carter moteur; les équipements seront les mêmes que la version GA7.

 

 

Moto BSA A50

 

 

Le troisième modèle sera la BSA A50 « Royal Star », même mécanique avec 3 ch. supplémentaires et mêmes équipements que la version A50. Par contre, elle sera dotée d’un compteur de vitesse hors du phare, de clignotants ainsi que nouveaux commodos; sur certains modèles des sacoches en cuir seront de couleur noire.

 

Moto BSA Royal Star

 

Mais avec ces dernières machines, un manque récurent de fiabilité apparaît et l’administration se tournera dans le début des années 70 vers la marque allemande BMW (Bayerische Motoren Werke).

 

 

A en croire les motards de cette époque qui ont roulé sur cette machine, « on savait quand on partait, par contre parfois on n’était pas sûr de rentrer et on avait toujours une corde dans la sacoche ou on se servait de nos ceinturons pour tracter la moto qui était en panne avec la moto qui fonctionnait ».

 

Un grand changement se produira au niveau des motocyclistes avec un pilotage différent puisqu’il y aura inversion des commandes aux pieds. Sur la BSA,  la sélection des vitesses était à droite et la première en haut les trois autres rapports en bas, pédale du frein arrière à gauche alors que, pour la BMW, la sélection des vitesses est à gauche et la première en bas et les trois autres rapports en haut, pédale du frein arrière à droite. La transmission à la roue arrière se fera par cardan alors que la BSA se faisait par chaîne.

 

Coll. A. Moulis

 

Le premier modèle sera la BMW R 60/5 de 1970 à 1973. Equipée d’un moteur bicylindre FLAT TWIN de 600 d’une puissance de 50 Cv, démarreur électrique, elle dispose d’une boite de vitesse à 4 rapports, transmission par cardan et pont, des freins à tambour mais double cames à l’avant. Son poids en ordre de marche est d’environ 205 Kg et sa vitesse de pointe de 155 km/h. Dotée d’une selle monoplace et de suspensions beaucoup plus confortables, ses freins sont beaucoup plus puissants et sécurisants. Les sacoches seront identiques à celles du modèle des BSA. Il y aura un problème de tenue de route, des guidonnages apparaîtront à une certaine vitesse et BMW modifiera la moto par l’allongement de 3 cm du bras oscillant. Cette époque voit l’arrivée des postes radio sur les motos avec un boîtier renfermant celle-ci.

 

Le deuxième modèle sera la BMW R60/6 de 1974 à 1976. Elle sera, du point de vue des caractéristiques techniques et des équipements, quasi identique à la précédente, seule la boîte de vitesse passera de 4 à 5 rapports avec un groupe compteur/compte-tours modernisé en dehors du phare qui lui aussi sera plus performant. D’un poids de 222 kg, elle atteint une vitesse de pointe de 165 km/h.

 

Moto BMW R60/7

 

Le troisième modèle sera la BMW R60/7 de 1977 à fin 1978. Elle sera le dernier modèle abouti de ce type. Au niveau technique, le moteur et la boîte de vitesse seront identiques à la 60/6. Quelques modèles auront un allumage électronique et, sur ce modèle, c’est l’arrivée des freins à disques ventilés, un disque à l’avant et un tambour à l’arrière. Certaines unités seront dotées de motos avec deux disques à l’avant. Un changement du guidon bas par un guidon haut sera opéré. Le poids sera de 225 KGS et la vitesse de pointe avoisinera les 170 Km/h.

 

En fin de l’année 1978, BMW sortira une nouvelle moto, la BMW R650; nouveau cadre, fourche, moteur, carburation, freinage par deux disques ventilés de marque Brembo à l’avant. Seules la Douane et la police parisienne seront dotées de ce modèle. L’équipement sera identique à la version 60/7.

 

 

Moto BMW 5650 à gauche de la photo

 

Dans la même période, l’administration se tournera vers la marque Honda en achetant une quinzaine de HONDA CX 500, équipées de selle monoplace, support radio et sacoche cuir idem au BMW, cinq unités en seront dotées pour essayer ces machines, elles resteront dans ces unités jusqu’à leurs réformes.

 

Honda CX500 Coll. A. Moulis

 

Un grand changement s’opère dès le début des années 80 puisque certains constructeurs comme Yamaha mais aussi une nouvelle marque de moto française; BFG (BOCCARDO, FAVARIO, GRANGES qui deviendra MBK – MOTOBECANE) s’intéressent au marché des machines administratives (Douane, Police et Gendarmerie). Elles seront produites en petites quantités, 160 machines seront construites dont 20 pour la douane. Seules les unités d’Annecy, Arras, Bordeaux, Dax, Dijon et une machine à l’école des Douanes de La Rochelle en seront dotées. Ce sera la première moto de couleur bleue.

 

 

MBK (BFG) 1300 – sortie d’usine

 

Coll. J.J. Soulié

 

Au niveau technologique, les ingénieurs construiront la machine autour d’un moteur de voiture venant de la « CITROËN GS», un 4 cylindres « Flat Twin » de 1300 cm3 d’une puissance de 70 ch, d’un embrayage mono-disque, d’une boîte de vitesse qui à l’origine aurait dû être fournie par MOTOGUZZI mais qui sera de facture française BFG. Equipée d’une transmission par cardan et pont, elle sera munie d’un carénage intégral, d’un tableau de bord de Renault R5 Alpine, une fourche Espagnole « telesco » et de roues italiennes FPS. Le freinage comportera deux disques de la marque BREMBO. Des sacoches rigides de la marque KRAUSER, un boîtier radio spécifique complétera l’équipement. Elle avoisinera les 300 kg et une vitesse maxi d’environ 200 km/h. Une protection, un confort et une vitesse de pointe jamais vu sur une moto de service.

 

A l’époque, les motards ayant roulé sur des machines peu confortables, dépourvu de protections apprécieront particulièrement ce genre de machines.

 

 

MBK (BFG) 1300 équipée de sa radio.

 

 

Mais des problèmes de fiabilité et de conception ainsi que d’approvisionnement en pièces détachées feront que les motos ne resteront qu’une dizaine de mois dans les unités. La chaîne d’assemblage de l’usine MBK/BFG sera rachetée par la marque YAMAHA fournira à la place des YAMAHA XJ 900 de couleur noire équipées d’un carénage intégral, selle mono place, boîtier radio et sacoches rigides de marque KRAUSER.

 

 

Moto Yamaha XJ 900

 

 

A partir de l’année 1985, la douane se tourne vers la marque BMW et les motos BMW R 80 RT1 arrivent dans les unités. Elles auront une couleur bleue un peu plus foncée qui deviendra par la suite le « bleu Douane ». Il s’agit d’une moto avec carénage intégral et, pour la première fois, une sérigraphie « Douanes » sur les deux côtés du carénage. Dotée d’un moteur flatwin de 800 cm3 et d’une boite cinq vitesses, elle dispose pour le freinage d’un disque à l’avant et d’un tambour à l’arrière, d’une suspension arrière monobras avec un seul amortisseur, d’une selle monoplace, de sacoches rigides de petite contenance de marque BMW étant appelées « city ». Certaines seront dotées de feux de pénétration « bleu » et d’avertisseurs sonores électronique Mercura « deux tons ».

 

 

Moto BMW R80 RT1 (à droite de la photo)

 

Une petite anecdote …: C’est la venue en visite des services douaniers à Bordeaux d’un ministre des finances en la personne de « Michel Charasse » qui a souhaité être escorté par les motards de la Douane. L’escorte fût pratiquée « à l’ancienne »  c’est-à-dire au sifflet et à l’arrivée de l’escorte Monsieur le Ministre s’est étonné que les motards n’aient pas utilisé le Klaxon de priorité « deux tons », il posa la question aux motocyclistes présents et ils lui répondirent « Monsieur le ministre, nos motos ne sont pas équipées de dispositifs sonores et lumineux, nous sommes en catégories B au niveau du code de la route… ». Après avoir écouté les agents et s’être renseigné, Michel Charasse leur dira « Ce n’est pas normal. Je ferai le nécessaire dès que je rentre à Paris ». Quelques mois plus tard, la douane fut classée en catégorie A des véhicules prioritaires au niveau du code de la route et par la suite les motos seront livrées avec l’équipement complet « police ».

 

En 1985, BMW change son fusil d’épaule et fabrique  des machines à moteurs 3 cylindres à plat dotés d’une injection électronique et refroidissement liquide pour une nouvelle gamme de motos. En 1989, BMW produit la BMW K75 RT qui aura deux déclinaisons successives pour les motos administratives, les premières versions seront dotées, un moteur de 75 ch, d’un carénage intégral et boîtier radio de couleur bleue, une sérigraphie spécifique Douane, des feux de pénétrations et klaxons deux tons Mercura et selle monoplace, deux sacoches BMW CITY 17 litres, un pare-brise dit « plat avec déflecteur » qui sera changé par un pare-brise bombé haut modèle qui procurera plus de protection, système de freinage deux disques à l’avant et un disque à l’arrière, un feu anti-brouillard, une vitesse maxi de 190/200 Km/h.

 

L’administration des douanes sera la première à en être équipée, et les premières versions arriveront dans les unités sans les sérigraphies, feux de pénétration et klaxons deux tons. Ce modèle aura une particularité: un frein arrière très sensible au blocage de roue.

 

 

 

Moto BMW K75 RT (1ère série) 

Moto BMW K75 RT (sérigraphiée et équipée radio & 2 tons))

 

 

En 1996 la deuxième génération de K75 RT arrive dans les unités. Elle est « toutes options » avec jauge à carburant, montre et prise allume-cigare mais surtout un système ABS  qui améliore  freinage du premier modèle; des sacoches rigides BMW grand tourisme 35 litres remplaceront les versions CITY.

 

 

Motos BMW 1575 RT (deuxième version et dernier modèle)

 

Motos BMW K1100 LT

 

Les derniers modèles livrés, la marque arrête la fabrication des K75RT et l’administration n’a qu’une solution après avoir fait des essais : prendre la gamme supérieure puisque sur les appels d’offres des marchés publics, seul BMW propose des motos administratives sérigraphiées. Ce sera à partir de 1998 que l’on verra la BMW K 1100 LT. Elle est équipée comme la K75 RT mais dispose en plus un moteur 4 cylindres à plat 16 soupapes, injection, refroidissement liquide d’une puissance de 98 Cv, catalyseur et boîte 5 vitesses. Pour la protection du motard, elle offre un carénage plus enveloppant, un pare-brise électrique – réglable en fonction de sa hauteur et sa vitesse, un guidon monté sur « silentbloc », une suspension arrière « Paralever » (articulation du pont et du bras de suspension par biellette) pour arrêter la moto qui prend en vitesse de pointe 210/220 km/h. Un nouveau système de freinage avec des disques de plus grand diamètre à l’avant et un ABS de deuxième génération sont également incorporés. Beaucoup de motocyclistes apprécieront cette moto, que ce soit pour son confort, pour ses performances ou pour sa fiabilité.

 

 

 

 

 

Suite à la fin de la production de la K1100 LT, en milieu d’année 1998, l’administration fait des essais avec deux nouveaux modèles de motos. Leader sur le marché des motos administratives, BMW revient avec un moteur bicylindre à plat avec deux cylindrées 850 et 1100. La nouvelle partie « cycle » comprend deux éléments de suspension: le télélever avec un amortisseur classique pour l’avant et le paralever pour l’arrière comme sur la K1100 LT. Cette moto intègre une nouvelle génération d’ABS avec une assistance assistée électrique mais aussi un nouveau carénage ainsi que des poignées chauffantes. Ce sera le modèle 1100 qui sera retenu et arrivera dans les unités dès 1999 sans toutefois connaître un franc succès par rapport à la K1100LT qui faisait l’unanimité des motocyclistes. En vitesse de pointe la machine arrivera péniblement à une vitesse de 190 km/h. Cette moto aura une tenue de route aléatoire surtout sur route humide. Elle sera équipée de tout l’équipement administratif. Par contre, les sacoches seront plus petites : 27 litres. Les points forts de cette moto seront toutefois : la protection, le confort et le freinage.

 

Moto d’essai BMW 1100 RT non sérigraphiée

 

 

 

Au tout début des années 2000, il n’y a que BMW qui fabrique des motos pour les administrations.  Sa toute nouvelle version,  la BMW R 1150 RT est une version qui n’a plus rien à voir avec les R1100RT: le moteur gagne un peu de puissance mais beaucoup en souplesse. Elle offre surtout une nouvelle boîte de vitesses à 6 rapports, une nouvelle face du carénage avec un nouveau phare intégrant deux antibrouillards et une nouvelle partie « cycle ». Au niveau des accessoires, elle est identique à la R1100RT à l’exception  des sacoches qui passent de 27 à 35 litres. Par contre, la tenue de route est nettement meilleure avec un freinage ABS encore amélioré et que l’on appelle « freinage assisté-couplé »: dès que l’on freine, une assistance électrique sur le levier ou la pédale de frein actionne les freins avant et arrière. L’année 2004 connaîtra la dernière génération de cette moto avec une amélioration moteur, un allumage à deux bougies par cylindre dit « double allumage ».

 

 

Moto BMW R1150 RT

 

Coll. A. Moulis

 

En 2005, la YAMAHA FJR 1300 arrive dans les unités. C’est un peu une révolution chez les motards « Pro ». C’est une moto performante, fiable, mais toutefois moins confortable qu’une BMW. Elle a toutes les caractéristiques d’une moto administrative et tous les changements demandés par l’administration sont effectués par la marque avec une très bonne réactivité.

 

Les motos sont des motos civiles adaptées pour l’administration comme d’ailleurs BMW l’a toujours fait. Un moteur 4 cylindres face à la route, d’une puissance de 106ch, une boîte 5 vitesses permet une vitesse maxi d’environ 220 Km/h. Dotées d’un cadre en aluminium avec des suspensions nouvelles générations, elles sont équipées d’un pare-brise électrique spécifique pour une meilleure protection du motocycliste, de poignées chauffantes et de tous les éléments administratifs (comme les feux de pénétrations à led à l’avant et à l’arrière) ainsi que d’un pare-moteur et de pare-sacoches.

 

 

Moto Yamaha FRJ modèle 1300 – Modèle 2005

 

En 2008, elle sera modernisée, avec un nouveau tableau de bord (compteur/compte tours), des rehausses de guidon, une selle confort, un bras oscillant rallongé de trois centimètres et des suspensions plus adaptées et de qualité par rapport au standard Yamaha, des feux additionnels antibrouillards, un nouveau boîtier radio plus aérodynamique et esthétique. A partir de 2010  jusqu’en 2013, les feux de pénétration arrières sont enlevés et remplacés par un gyrophare.

 

Motos Yamaha FRJ modèle 1300 – Modèle 2008

Moto Yamaha FRJ modèle 1300 – Modèle 2010

 


Conclusion

 

Nous limiterons notre étude aux motos utilisées antérieurement à la première décennie de ce siècle en faisant le choix de ne retenir que celles qui, désormais, appartiennent déjà à « l’Histoire de la spécialité ». Cette étude n’a bien sûr pas la prétention d’être exhaustive; une évocation, par exemple, des motos plus « spécifiques » comme ces machines de type « Trail » utilisées en Corse dans les années 80 puis dans les décennies suivantes ou encore des motos en fonction à la direction générale mériteraient un développement particulier.

 

Au total, plus d’une vingtaine de types de motos ont été successivement utilisés dans l’administration des douanes entre le début des années soixante et la première décennie du 21e siècle. Au fil des ans, les machines ont été sans cesse adaptées par les quatre constructeurs concernés (BSA, BMW, YAMAHA et HONDA) afin de répondre aux exigences spécifiques de l’administration pour l’exercice de ses missions de surveillance et d’interception.

 

On mesure aisément, à l’examen des données techniques et des équipements, le chemin parcouru en cinquante ans que ce soit bien sûr au niveau de la vitesse, de la fiabilité, de la tenue de route mais aussi – et on ne peut que s’en féliciter – du confort du motard …

 

 

 

Didier Hess

 

 

 

 

 


 

Note:

(*)  (Sources: Coll. D. Hess pour toutes les photos de cet article – sauf mention contraire)

 

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