Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes
2e conférence AHAD: les missions spéciales pendant la première guerre mondiale
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Le 4 juin dernier, l’AHAD, avec l’appui du Pôle Soutien Général de la Direction générale et du Centre de Documentation, a organisé à Montreuil une conférence traitant des « Missions spéciales pendant la Première Guerre mondiale ». L’intervenant, le lieutenant colonel Olivier Lahaie a su captiver son auditoire en condensant l’ouvrage qu’il a consacré à ces près de 70 missions spéciales auxquelles ont participé des douaniers.
3 axes ont illustré son propos : le pourquoi des missions spéciales, les participants à ces missions et les moyens utilisés.
1 – Les missions spéciales, pourquoi ?
Avant 1914, le renseignement en est à son balbutiement. Ce n’est qu’au tournant de la Première Guerre mondiale que la soif de progrès de la part des services de renseignement et des techniques employées vont se faire jour.
Entre 1914 et 1918, on assiste à une évolution du matériel (des pigeons voyageurs au poste TSF portatif) et des moyens (le 2ème bureau du Grand Quartier Général est la composante « renseignement ». C’est le début de l’emploi de l’aviation comme source de renseignement).
Sur le front occidental, des douaniers inemployables en tant que combattants se portent volontaires pour les missions spéciales. 1915 sera la grande année de ces missions en terme de nombre avant le déclin en 1916 et 1917. En 1918, Olivier Lahaie ne répertorie que quelques missions de sabotages.
2 – Les missions spéciales, avec qui ?
La 5ème armée du général Franchet d’Espèrey commandant du 3 septembre 1914 au 1 mars 1916 croit aux vertus du renseignement après l’échec de 2 offensives. Le général a confiance dans l’aviation.
Les pilotes recrutés sont de vrais casses-cous. Les plus célèbres sont Védrines, Guynemer ou Navarre.
Parmi les missionnaires, le travail d’Olivier Lahaie a permis d’identifier une quinzaine de douaniers ; ils présentent l’avantage de connaître la région où ils sont déposés, sont capables de rédiger des comptes-rendus précis et exploitables, et savent se dissimuler.
3 – Les missions spéciales, comment et avec quoi ?
Pour les missionnaires et les pilotes une école de formation est dédiée à Hermonville dans la Marne. Les avions sont des mono ou des biplans allégés au maximum, en aluminium. En terme de transmission du renseignement, les pigeons voyageurs sont le moyen privilégié. Chaque missionnaire porte entre 4 et 6 pigeons voyageurs sachant que chaque message doit être doublé. Entre 1916 et 1917, des « ravitaillements » en pigeons sont prévus pour accroître le nombre de renseignements par mission. Puis, le poste TSF portatif remplace l’animal.
L’équipement du missionnaire est composé d’un pistolet, d’un couteau, de battons de dynamite (d’abord à mèche lente puis à détonateur), des vivres et quelques pièces pour acheter de la nourriture. Une veste en cuir et un uniforme complète la panoplie du missionnaire. Le port de l’uniforme permet d’éviter d’être fusillé en tant qu’espion.
Olivier Lahaie a dénombré au moins une cinquantaine de missions sur le front occidental. Les Français ont été précurseurs dans le domaine du renseignement avec ces missions spéciales et il ne semble pas que les Allemands aient cherché à copier ce mode d’actions. Les Britanniques vont perfectionner ces techniques et les mettre en pratique au cours de la Seconde Guerre mondiale. La France va attendre l’Indochine pour redécouvrir le modus operandi de ces missions spéciales, perpétré également lors de la guerre en ex-Yougoslavie où des pilotes seront déposés en profondeur en Serbie.
Guillaume Dorey
Pour en savoir plus :
LAHAIE (Olivier), Les missions spéciales pendant la Première Guerre mondiale, Histoire et Collections, Paris, 2018, 128 p. – disponible auprès de l’AHAD
Reportage de France 3 Ardennes sur le centre de formation d’Hermonville https://france3-regions.francetvinfo.fr/grand-est/marne/hermonville/histoires-14-18-ecole-missions-speciales-804393.html