Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes
Poème : « Un amour de Douanier » par V. Mazzacane
Nous poursuivons ici le florilège de la « douane littéraire » avec une ode à la capricieuse muse « fraude » d’un douanier poète inspiré à défaut d’avoir eu du flair.
L’équipe de rédaction
Quelle est cette ombre noire qui glisse dans la nuit ?
Son pas lent l’achemine vers son destin, sans bruit,
Ses yeux fouillent l’obscur, à travers ce grand bois
Il marche inconsciemment, engourdi par le froid.
Les nuages défilent ; Jouant à cache-cache
La lune d’un rayon éclaire sa moustache.
Mais que cherche-t-il donc ? là, perdu dans le noir,
Peut-être bien qu’il va poursuivant cet espoir
Qui hante son esprit, qui le met au supplice ;
La trouvera-t-il donc ? cette maudite piste.
Tout-à-coup, il s’arrête, et le voici, flairant,
La tête relevée, tout comme chien errant,
La bise qui ce soir là lui fait courber l’échine,
L’envahit, le pénètre, et puis soudain l’anime,
Qu’a-t-il donc pu sentir ? que son pas s’accélère,
Ses gros souliers ferrés font résonner la terre ;
Un juron, et voici qu’il se met à courir
Ses jambes lui font mal, qu’importe, il faut souffrir
L’honneur le lui commande, et il serait content
S’il pouvait aujourd’hui honorer son serment.
Il court, il court toujours, mais au bout du chemin
Il s’arrête haletant, ayant couru en vain.
Avait-il bien ouï ? ou bien était-ce un rêve ?
Qui toujours le poursuit, sans accorder de trêve.
Mais pourra-t-il enfin la rencontrer un jour ?
Celle pour qui il veille avec force et amour,
Celle dont il croyait avoir trouvé la trace,
Celle qui chaque jour le tourmente et le lasse.
Ah ! s’il pouvait l’attraper, cette folle déesse,
Son cœur s’épancherait dans la joie et l’ivresse,
De pouvoir la serrer enfin entre ses bras,
La sentir, la palper, et lui dire tout bas :
Cette fois c’en est fait, tu ne m’échapperas point,
Aujourd’hui, tu es là ! où seras-tu demain ?
Et l’image s’en va, le laissant là, rêveur,
Le jour qui s’est levé le sort de sa torpeur,
L’heure vient de sonner au clocher du village,
Il poursuit son chemin, et reprend son courage,
Il en a bien besoin, s’il veut suivre sa voie,
Dame fraude l’a trompé pour encore une fois.
V. Mazzacane
Agent breveté stagiaire
Extrait du « Journal » de la 2e session 1955 de l’École des brigades
Journal de la formation professionnelle
N° 52
Novembre-Décembre 1955