Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes
L’origine lyonnaise de la douane…
La douane serait née à Lyon! Découvrez cet article, publié dans le « Journal de formation professionnelle » de 1961, dans la rubrique « Chronique du temps passé » sous le titre: « l’origine lyonnaise de la douane ».
N.D.L.R. (1961) – L’étymologie du mot « douane » est fort controversée. Appliqué pour la première fois, en France, à la Douane de Lyon, le terme passa dans la langue nationale. M. P. Pierrat, Directeur Honoraire des Douanes, a bien voulu nous livrer la thèse d’auteurs lyonnais sur l’origine de ce mot. Nous le remercions bien vivement.
Extrait de l’ouvrage de A. Poidebard « L’ancienne Douane de Lyon » (Imprimerie Mougin-Rusand, Lyon, 1892)
La Douane de Lyon, qui fut une institution à part sous le régime des anciennes barrières intérieures, fut la première qui reçut en France le nom de douane. Les autres taxes très nombreuses établies au profit du Trésor royal avaient des qualifications différentes qui variaient à l’infini, c’étaient les droits de traites, traites foraines, traites domaniales, haut passage, etc… De telle sorte que l’on peut dire que le mot douane employé pour désigner les droits perçus sur les marchandises en circulation, a une origine bien lyonnaise, n’en déplaise aux Lyonnais d’aujourd’hui, si fort opposés à ce genre d’imposition. Le mot, sinon la chose, qui elle, existait en Gaule dès l’époque de la conquête romaine, le mot nous vient de nos voisins les Italiens, et plus spécialement des coutumes établies à Venise à l’époque de sa. prospérité commerciale. On y qualifiait sous le gouvernement des doges, du nom de Dogana, les droits établis sur les marchandises étrangères pour protéger le commerce des marchands vénitiens. Avec les Italiens venus dans notre ville au IVe siècle, s’introduisit à Lyon et en France, pour la première fois, l’usage du mot douane, dérivé de Dogana.
A. Poidebard
Extrait de l’ouvrage de A. Sabatier « Sigillographie historique des Administrations fiscales » (Libr. Honoré Champion Paris 1912)
Chapitre III – Origine de la Douane
De toutes les Douanes de France, celle de Lyon est la première qui ait été ainsi dénommée. Le mot nous vint d’Italie et de Lyon passa dans la langue nationale. Mais son étymologie reste incertaine, L. du Crot (Nouveau Traité des Aydes, Tailles et Gabelles, Paris, 1623) y voit la signification quasi Dos vel Douarium. Ménage tire le mot du grec Dokané, lieu où l’on reçoit les marchandises. Littré, s’appuyant sur la forme espagnole, Aduana, qui laisse soupçonner l’article « al » arabe propose le mot Ad-divan, le divan. A la suite du P. Menestrier (Hist. civile ou consulaire de la ville de Lyon, 1696) nos auteurs locaux le font dériver de l’italien, Dogana, droits établis à Venise par le gouvernement des Doges sur les marchandises étrangères. Je crois avec eux qu’il nous fut apporté par les trafiquants italiens de Venise ou de Gènes, mais non sous la forme Dogana. La chute du g intervocalique s’était déjà produite en Italie même, où l’on disait par contraction Doana. Dans aucun texte français du XVIe siècle on ne rencontre les termes Dogane ou Dogana. Je pense donc que nos mots lyonnais, Duane, Douane et Douanne procèdent strictement de l’italien, Doana, lui-même issu de Dogana. L’orthographe du mot a longtemps varié. Paradin (Hist. de Lyon, 1573) écrit Doüane , et de Rubis (Hist. de Lyon, 1600), Doüanne. Au XVIIIe siècle on rencontre encore ces formes, auxquelles on peut joindre Doanne et Doane. L’almanach de Lyon de 1746 et années suivantes donne enfin : Douane L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert (édition de Genève) employait le terme Douanne.
Le mot apparaît tardivement sur nos sceaux. D’après ceux de ma collection, ce serait sous le régime de Louis XV, au milieu du XVIIIe siècle. On trouve alors des plombs de différents types avec cette légende nominative : Doanne, Douanne et Douane de Lyon. Il est curieux que ces inscriptions sur les sceaux ait été à Lyon si tardive, alors qu’un plomb de la Douane de Paris, daté de 16o6, porte déjà le mot Douane.
Quoi qu’il en soit de ces considérations étymologiques, la Douane de Lyon était une administration de l’ancien régime fort particulière. Son expansion hors de Lyon même, dans tout le sud-est, les nombreuses marchandises soumises à son tarif, l’importance des soies et soieries, avaient fait d’elle peu à peu une des plus productives institutions fiscales du royaume.
A. Sabatier
Journal de la Formation professionnelle
N°99 – mai-juin 1961