Association pour l’Histoire de l’Administration des Douanes

De la conspiration bonapartiste de grenoble (1816) à un libellé ultraroyaliste (1823) épurations administratives sous la restauration

Mis en ligne le 1 novembre 2023

Cet article a été édité par le CHEFF (Comité pour l’Histoire Economique et Financière) dans le volume n° XII d’Etudes et documents (2000), p. 124-161. de la collection « Histoire économique et financière de la France ». Autres ouvrages publiés par le Cheff concernant l’histoire de la Douane :

 

— Jean Clinquart, Les services extérieurs de la ferme générale à la fin de l’Ancien Régime. L’exemple de la direction des fermes du Hainaut, Cheff, coll. Histoire économique et financière de la France, Etudes générales, 1996.

 

— Jean Clinquart, L’administration des douanes en France de 1914 à 1940, Cheff, coll. Histoire économique et financière de la France, Etudes générales, 2000.

 

— Jean Bordas, Les directeurs généraux des douanes. L’administration et la politique douanière, 1801-1939, Cheff, coll. Histoire économique et financière de la France, Etudes générales, 2004.

 

Tous ces ouvrages sont aussi présentés sur le site internet : www.comite- histoire.minefi.gouv.fr

 

NDLR  Cahiers d’histoire des douanes n° 36 – 2e semestre 2007

 


 

 

I – La vengeance d’un douanier révoqué

 

En 1823, paraissait chez Trouvé. imprimeur-libraire à Paris, et chez plusieurs libraires du Palais-Royal, un libelle de 80 pages intitule « De la justice de M. le comte de Saint-Cricq, directeur général des douanes royales, conseiller d’État ; ce qu’il a fait et combien sa manière d’administrer doit être rassurante pour les vrais amis de la monarchie légitime ».

 

L’auteur, Jules Paulmier, se présentait comme « ex-lieutenant des Volontaires royaux à Gand, vérificateur des douanes royales, employé des postes militaires à l’armée de Catalogne ». Il s’agissait, en fait, d’un fonctionnaire révoqué, décidé à régler des comptes avec son ancienne hiérarchie.

 

Pierre de Saint-Cricq, administrateur des douanes sous l’Empire, puis directeur général de cette administration sous la seconde Restauration, mais aussi députe des Basses-Pyrénées, se trouvait alors en difficulté. Son protecteur, le duc Decazes, avait été victime de l’offensive des ultras après l’assassinat du duc de Berry, et le ministère des Finances était tenu par Villèle qui ne portait pas dans son cœur le chef de l’administration des douanes.

 

Bien qu’il se fut rallié aux Bourbons avec sincérité et que, dans l’exercice de ses fonctions, il ait donné des gages de son adhésion au nouveau régime, Saint-Cricq faisait partie de ces anciens serviteur de l’Empire dont l’extrême droite réclamait l’élimination. Vraisemblablement financé par les ennemis politiques du directeur général des douanes et dédié à la duchesse d’Angoulême (1) , le libellé de Jules Paulmier s’inscrivait dans une campagne qui, deux ans plus tard aboutirait au remplacement de Saint-Cricq par un légitimiste bon teint.

 

L’auteur du pamphlet nous est connu par l’état de ses services administratifs (2). Originaire de la Seine-Inférieure, entré dans les douanes en qualité de préposé en 1811, il s’était élevé au grade de contrôleur de brigades (c’est-à-dire de capitaine) avant d’être versé dans le service des bureaux.

 

Vérificateur à Avesnes-sur-Helpe. puis à Soire-le-Château, dans le département du Nord. il venait, à quarante-sept ans, d’être destitué de son emploi.

 

Tout l’objet du libelle consistait à montrer combien Saint-Cricq et son administration se révélaient éloignés d’un attachement sincère à la monarchie et donc dangereux pour l’Etat. Parmi les exemples cités figurait la conspiration qui fut réprimée en 1816 à Grenoble et compromis, à tort ou à raison, les douanes locales, Paulmier pouvait évoquer cette affaire vieille de prés de sept ans avec d’autant plus d’apparente pertinence qu’il avait été amené à y jouer un rôle, secondaire certes, mais néanmoins réel.

 

Sur ce rôle et, plus généralement sur la carrière de Paulmier et les motifs de sa révocation, nous aurons à revenir, mais il importe au préalable de se reporter au début du mois de mai 1816.

 

II. Les douaniers de Grenoble et la conspiration de 1816

 

La nuit dramatique du 4 au 5 mai.

 

Le 4 mai 1816 à 10 heures du soir, Jean- François Radon, directeur des douanes à Grenoble, adressait par exprès au comte de Montlivault, préfet de l’Isère, le billet suivant :

« Monsieur le préfet,

Un cavalier d’ordonnance expédié de Barreaux par M. Peltier, contrôleur des brigades (3) des douanes de cette résidence vient de m’apporter les deux lettres ci-jointes desquelles il paraitrait résulter que des bruits alarmants se seraient répandus dans les communes qui avoisinent les rives de l’Isère.

 

Je ne sais pas jusqu’à quel point ces bruits peuvent être fondés ; quoi qu’il en soit, je crois de mon devoir de ne pas perdre un moment à vous transmettre ces deux rapports et de vous prier de vouloir bien me donner les instructions que vous jugerez nécessaire. »

 

Les informations fournies par ces deux fonctionnaires ne faisaient que confirmer d’autres avis parvenus à la préfecture depuis le matin du 4 mai, et M. de Montlivaut ne doutait plus alors qu’une insurrection fût imminente.

 

Depuis plusieurs jours déjà des rumeurs circulaient et elles lui avaient été rapportées par la police. Celle-ci avait observé, fin avril-début mai « une agitation sourde », mais elle n’avait pu recueillir que « des renseignements vagues » (4).

 

Dans l’ignorance où il se trouvait de la « cause positive » de cette « fermentation », et ne croyant sans doute pas alors qu’il pût s’agir des prodromes d’une insurrection, le préfet s’était borné à prendre des « précautions de sûreté » sous forme de patrouilles fréquentes de la garde nationale dans la ville de Grenoble. Cette initiative avait agacé le commandant de la 7e division militaire, le général Donnadieu, personnage abrupt et imbu de son autorité, avec lequel le comte de Montlivault entretenait des rapports tendus.

 

Le général tenait pour billevesées les rumeurs sur lesquelles le préfet s’était fondé. Le 3 mai. des rapports parvinrent « en assez grand nombre » à la préfecture « sur des propos annonçant une insurrection qui se tenaient ouvertement ».

 

Aussi, Montlivault réunit-il magistrats et commissaire général de police pour procéder à l’interrogatoire de personnes signalées comme mêlées au colportage de ces propos « dont on souhaitait connaître l’origine ».

 

Cette opération ne fut pas convaincante mais le préfet jugea quand même prudent de placer préventivement en prison quelques individus connus pour leur hostilité au gouvernement. Il ne réussit pas, en revanche, à convaincre le général Donnadieu de prendre des mesures d’ordre militaire.

 

Durant la matinée et l’après-midi du 5 , autorités civiles et militaires tinrent plusieurs conférences. Les avertissements affluaient, en effet, mais le général Donnadieu se montrait toujours aussi sceptique. Il ne changea d’avis que vers 8 heures du soir, dans des circonstances passablement rocambolesques.

 

En sortant de la préfecture, il rencontra un lieutenant à demi-solde nommé Arribert qui portait ostensiblement une arme : c’est alors que. selon une expression employée par de Montlivault, « un nuage tomba de ses yeux » (6) et que la décision fut prise d’agir immédiatement et, s’il était encore temps, préventivement.

 

Inspirés par le gouvernement. les journaux écrivirent plus tard qu’il « circulait depuis quelques Jours dans le département de l’Isère des bruits qui avaient éveillé l’attention des autorités » (7). Un communiqué du ministère de la Guerre corrobora également la thèse selon laquelle « les autorités de la ville (avaient été) averties par de nombreux rapports qu’il régnait une assez grande agitation dont on ne pouvait déminer la cause précise (…).

 

Ces avis et quelques indices certains (n’avaient pas permis) de douter qu’il ne se tramait quelque complot ».

 

Comme « indice certain », le communiqué cite l’arrestation du nommé Arribert par le général Donnadieu, événement qui avait conduit à « mettre la garnison sous les armes » (8). A l’évidence, le cabinet était soucieux de rassurer l’opinion publique, et plus encore les chancelleries, sur son aptitude à maîtriser la situation intérieure, en 1816 mieux que l’année précédente.

 

En réalité, l’événement surprit les autorités et on ne manqua pas, dans certains cercle parisiens, d’en faire le reproche au préfet. Celui-ci connaissait l’hostilité aux Bourbons de la majorité des Dauphinois et il en avait rendu compte au ministre de la police ; il n’ignorait pas, par ailleurs, les allées et venues de personnes suspectes : il était éloigné cependant, jusqu’à la veille de l’événement, de s’attendre a une imminente sédition.

 

La réaction des représentants locaux du pouvoir fut en tout cas rapide et efficace. À la nouvelle que « des bandes armées formées dans les campagnes se préparaient à marcher sur Grenoble » Donnadieu envoya à leur rencontre de la cavalerie et de l’infanterie. Il savait que les rebelles venant de Bourg-d’Oisans, de La Mure et de Vizille allaient se porter sur Eybens ou les rejoindraient d’autres rebelles en provenance du Grésivaudan.

 

Les troupes ne manquaient tels dans le ressort de la 7e division militaire ; en sus de la garnison de Grenoble, le général disposait d’éléments de la garde nationale venus de plusieurs départements et cantonnés dans le chef-lieu de l’Isère en attendant de prendre position sur l’itinéraire que la princesse Marie-Caroline de Naples allait emprunter pour se rendre à Paris ou son mariage avec le duc de Berry devait être célébré le 17 juin.

 

Quelques jours avant les événements auxquels il se trouvait confronté. Donnadieu avait remis leurs drapeaux aux légions et corps de cavalerie appelés à rendre les honneurs à la princesse lors de son passage sur le territoire de la 7e division ; il s’était alors félicité de l’attitude de la population « électrisée par l’enthousiasme et la chaleur des troupes » (9).

 

Il n’est pas impossible (l’opinion en sera exprimée, en tout cas, par le Journal des débats (10), que les chefs de la conspiration, mal informés, aient compté qu’une grande partie des troupes réunies à Grenoble aurait quitté cette ville avant la nuit du 4 mai afin de prendre position sur la route de la future duchesse de Berry. S’il en fut ainsi, l’erreur commise ne fit que compromettre davantage une opération entreprise sous le signe de l’amateurisme et de l’improvisation.

 

Son échec fut rapide et total. La troupe envoyée à la rencontre des émeutiers n’éprouva aucune peine à disperser leur rassemblement. Quel était le nombre des insurgés venus de La Mure, Vizille et des localités avoisinantes ? De 1 000 à 1 200, selon des estimations excessives, de 3 a 400 selon des sources plus fiables (11).

 

La rencontre donna lieu à des échanges de coups de feu ; il y eut des morts — six vraisemblablement 12 — et des blessés dans les rangs des insurgés, La troupe fit des prisonniers, jusqu’à 200 selon certaines sources, nettement moins en réalité. Le reste prit la fuite (13).

 

Pour des raisons qui demeurent assez obscures, le Grésivaudan ne prit point part au mouvement comme ses organisateurs l’escomptaient. Ainsi, tout fut ici terminé en l’espace de quelques heures et le préfet, comme le commandant de la 7e division, purent, au matin du 5 mai, annoncer simultanément l’existence d’un mouvement insurrectionnel et son écrasement (14).

 

Quelles furent les causes et quels étaient les buts de cette « conspiration », pour employer le terme sous lequel fut généralement désignée l’affaire de Grenoble ? Qui l’organisa ? Qui y prit part ? Quelles en ont été les conséquences ?

 

Bien que l’on ne se trouve pas en présence d’un événement majeur de l’histoire de la Restauration, une telle curiosité est amplement justifiée par l’extravagance des faits. Souvenons-nous, en effet, que ceux-ci se produisent mains d’un an après la défaite de Waterloo, alors que 150 000 soldats étrangers occupent le nord et l’est de la France, prêts à intervenir une nouvelle fois si la conduite des Français le justifie aux yeux des puissances alliées.

 

Ajoutons que l’affaire intéresse l’histoire administrative dans la mesure où l’attitude équivoque des douaniers du cru à l’égard de la « conspiration » conduisit à une épuration sévère de ce service dans le département de l’Isère, et c’est. surtout sous cet angle qu’elle est envisagée ici.

 

 

L’origine d’une insurrection mort-née.

 

 

Dans leur majorité, les habitants du Dauphiné étaient loin d’avoir accueilli avec faveur la première Restauration. Le « berceau de la Révolution » nourrissait un fort courant l’opinion libéral auquel la perspective d’un retour à l’Ancien Régime faisait regretter l’Empire. Aussi, est-ce avec enthousiasme que Napoléon avait été cueilli par les Grenoblois lors du « Vol de l’Aigle ».

 

L’Empereur avait remercié les habitants de l’Isère en termes grandiloquents avant de gagner Lyon (15). Au cours de l’été de 1815, une courte occupation austro-sarde avait exacerbé l’humiliation ressentie après la défaite de Waterloo. Sans aucun doute cet épisode avait-il contribué a raidir la population dans son hostilité à un régime qui pour la seconde fois en l’espace d’une année, rentrait « dans les fourgons de l’étranger ».

 

Au demeurant, le second semestre de 1815 fut riche en événements de nature à entretenir la tension. L’Isère ne connut pas 1es excès de la Terreur blanche, mais la nouvelle des massacres perpétrés par les royalistes dans le Midi (événements que la rumeur publique se chargea certainement de grossir) ne manqua pas de circuler dans les vallées dauphinoises.

 

La crainte d’une extension de ces violences ne put que susciter des réactions d’autodéfense dans une ambiance de veillée d’armes. Il apparut très vite qu’aux « épurations » sauvages des premières semaines allait succéder une épuration épuration légale.

 

Les procès intentés contre de grands chefs militaires, gloire de la Révolution et de l’Empire comme le maréchal Ney, montrèrent que « les complices de la révolution du 20 mars (qualification officielle du retour de l’île d’Elbe) risquaient de sanglantes représailles. Ces actions indignèrent les anciens officiers des armées impériales qui, Français d’origine ou Savoyards, séjournaient nombreux en Dauphiné.

 

L’institution de tribunaux d’exception, les cours prévôtales, venant après la promulgation d’une loi dite de sûreté générale et d’une autre réprimant les cris et écrits séditieux (16), toutes ces mesures furent ressenties, avec juste raison comme marquant la volonté des ultras de tirer vengeance du passé. Tous ceux qui restaient fidèles à la Révolution et à son prolongement impérial furent un peu plus dissuadés de faire confiance aux Bourbons.

 

D’ailleurs le ministère montrait sur le terrain qu’il entendait « épurer » le pays. Le corps préfectoral, lui-même renouvelé, avait reçu pour instruction de destituer les maires suspects de tiédeur à l’égard du régime et de traquer les membres des « fédérations » qui s’étaient spontanément formées pendant les Cent Jours (17) . Le comte de Montlivault se fera gloire d’avoir révoqué 274 maires dans son département (18). Bien entendu. la magistrature n’avait pas échappé à ce grand nettoyage qui concernait l’ensemble des services publics, y compris l’administration des douanes que les ultras tenaient en particulière exécration, car elle leur apparaissait comme symbole du régime impérial.

 

Or, les douanes étaient fortement représentées dans le département de l’Isère auquel le retour à la frontière de 1792 avait rendu son ancien caractère frontalier. Grenoble était redevenue, en 1815, le siège d’une des directions des douanes importante dont le personnel comprenait une majorité d’agents originaires de « l’ancienne France » et de Savoie qui avaient reflué des départements italiens en 1814.

 

Tel était notamment le cas de Jean-François Badon, le directeur. Ce Grenoblois d’origine avait été chargé, en 1804, de la création de la direction de Voghera en Piémont. circonscription qu’il avait dirigée jusqu’à l’évacuation de l’Italie.

 

 

Jean Clinquart

 


 

Notes

 

1. Le Musée national des Douanes (1 place de la Bourse à Bordeaux), possède un exemplaire de cet ouvrage sur lequel figure une dédicace manuscrite à la duchesse d’Angoulême.
2. Archives de la Direction générale des Douanes. Sommier du personnel des bureaux et officiers des brigades de la direction de Valenciennes, années 1814 — env. 1830.
3. Le contrôleur des brigades — grade substitué à celui de capitaine général que la Ferme générale avait transmis à la régie des douanes, en 1791 — peut être assimilé à celui de capitaine auquel il céda d’ailleurs la place en 1839. Le terrain d’action du contrôleur de brigades formait un « contrôle » et correspondait aux zones de surveillance d’un nombre variable de brigades. Dans les contrôles les plus chargés le contrôleur de brigade, était assisté pat un lieutenant d’ordre.
4. A.D. Isère. 51 M .23.
5. AD, Isère 1 J 1328/81 & 105. Lettre du préfet de l’Isère au Ministre de la Marine. 30 mai 1816 et rapport au préfet du commissaire général de police de l’Isère, Armand de Bastard. 11 mai 1816.
6. AD. Isère t,1 J 1328/81. Lettre du préfet au ministre de la Marine.
7. Moniteur Universel n° 131 du 10 mai 1816 citant le Journal des débats.
8. Communiqué du 15 mai du ministère de la Guerre paru dans le n° 116 du Moniteur Universel
9. Moniteur Universel n°128 du 7 mai 1816.
10. Cité par le Moniteur Universel n° 131 du 10 mai 1816.
11. l A.D. Isère 1 J 1329/126. Rapport au Roi du comte de Montlivault, 1817 (fin mars ?) « Il a été démontré que Didier n’avait pas rassemblé plus de 3 à 400 hommes ».
12. C’est le chiffre donné par le lieutenant de palace Aymard dans une note du 24 février 1817 remise au comte de Montlivault (AD Isère I J 1329/ 134). Ce document corrobore une lettre du 6 mai 1816 du préfet au procureur du roi de Grenoble ( AD 15 U 2) ou sont signalés 15 cadavres relevés sur la route d’Eybens. Il est vrai que ce même document mentionne que, selon le colonel commandant les troupes lancées à la poursuite des fuyards « le nombre des morts des insurgés s’élevait à la centaine ». Il s’agît toutefois d’une exagération imputable à la tendance des militaires (à commencer par le général Donnadieu) à surévaluer les forces et la résistance adverses, donc leurs propres mérites.
13. Le nombre des prisonniers écroués dans la matinée du 5 mai s’est élevé à 47 selon le préfet (AD. Isère 15 U 2, lettre du 6 mai au procureur du roi) Il n’a pas du, au total, dépasser la soixantaine ; c’est d’ailleurs ce qu’indique le premier président de la cour royale dans le compte-rendu des évènements qu’il adresse au ministre de la Justice le soir du 5 mai 1816 (Arch.Nat. BB/3/104 p. 36).
14. Les comptes-rendus que les autorités judiciaires adressent à Paris sont tout aussi rassurants (A.N.BB/3/104 p. 36 et 94). La presse est apaisante elle aussi : le Moniteur qui attend le 10 mai pour anneau l’évènement, cite alors le Journal des débats, dont l’article souligne que « tout est dissipé, tout est calmé, et la sévérité de la justice va achever ce qui a été commencé par les armes ». Les félicitations et les récompenses diverses ne tardent pas à pleuvoir sut les autorités grenobloises, à commencer par le général Donnadieu qui, de baron d’Empire, est promu vicomte par ordonnance royale du 12 mai.
15. « Napoléon, par la grâce de Dieu et les Constitutions de l’Empire, Empereur des Français etc. Aux habitants du département de l’Isère. Citoyens ! Lorsque, dans mon exil, j’appris tous les malheurs qui pesaient sur la Nation, que tous les droits du peuple étaient méconnus et qu’il me reprochait le repos dans lequel je vivais, je ne perdis pas un moment. Je m’embarquais sur un frêle navire ; je traversais les mers au milieu des vaisseaux de guerre des différentes nations ; je débarquais sur le sol de la patrie, et je n’eus en vue que d’arriver avec la rapidité de l’aigle dans cette bonne ville de Grenoble dont le patriotisme et l’attachement à ma per- sonne m’étaient particulièrement connus. Dauphinois, vous avez rempli mon attente (…) Dauphinois ! Sur le point de quitter vos contrées pour me rendre dans ma bonne ville de Lyon, j’ai senti le besoin de vous exprimer toute l’estime que m’ont inspiré vos sentiments levés ; mon cœur est tout plein des émotions que vous avez fait naître ; j’en conserverai toujours le souvenir. Napoléon ».
16. La loi organisant les cours prévôtales date du 27 décembre 1815. Ces juridictions, héritières, en dernier lieu, des cours criminelles spéciales que le Consulat avait instituées pour réprimer le brigandage et la chouannerie, connaissaient des crimes de rébellion et de sédition militaire. Leurs arrêts étaient sans appel et exécutoires dans les 24 heures. Elles ont peu fonctionné et n’ont pas prononcé plus de 250 condamnations.
17. Les « fédérations » de 1815 sont nées dans l’Ouest, en avril, avec l’appui du ministère de l’Intérieur des Cents-jours. Elles se proposaient de réunir en un pacte d’assistance mutuelle tous ceux qui entendaient défendre les acquis révolutionnaires, au besoin par les armes. Cf. Dictionnaire Napoléon, article de G.Garrot. Les membres des fédérations furent les principales victimes de la loi de sûreté générale de décembre 1815.
18. AD.Isère 1 J 1329/126, rapport au roi du comte de Montlivault, 1817.

 

Cahiers d’histoire des douanes

 

N° 36

 

2e semestre 2007

 

 

 

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