André Larroudé, Le froid, 1960 (34/50)
André Larroudé…
Le froid, 1960*
Les douaniers
Un vent sauvage court, sous un ciel bas et sale.
Les arbres sans arrêt, agitent leurs bras nus,
Comme pour balayer le grand troupeau des nues,
Qui vient rapidement, dans la nuit qui s’affale.
Silencieux dans le soir, d’un pas automatique,
Sur le versant pentu, d’un col des Pyrénées,
Les douaniers, lentement, s’en vont la goutte au nez,
Sous leur noir capuchon, silhouettes tronc-coniques.
Par un sentier tordu, qui monte vers les crêtes,
Ils s’en vont loin… très loin ; pour attendre leur proie,
Dans quelque coin obscur, où ils auront très froid ;
Mais qu’importe ; ils s’en vont ; et leur marche est discrète.
Voici la roche creuse ; ils prennent position ;
Cependant que le vent multiplie les rafales
Et que tombe la nuit, abondante et glaciale,
Ils atteignent enfin, le point d’apparition.
C’est là que tout trempés, gelés et fatigués,
Mais prêts à faire feu, comme un chien de fusil,
Patients ils attendront, une belle saisie.
Attentifs dans le noir, tristes, ils font le guet.

*Source : De la penthière aux nouvelles frontières. Récits autobiographiques de douaniers, 1937-1996 – Morceaux choisis et commentés par Michèle Poulain,
IGPDE – Comité pour l’histoire économique et financière de la France (Cheff), 2012, p. 216.
Plus de renseignements sur https://www.economie.gouv.fr/igpde-editions-publications/penthiere-aux-nouvelles-frontieres .