Jules-François Agostini, Rapport de service (nuit de Noël) (Les Debout), 1902 (17/50)

Mis en ligne le 30 octobre 2025

De l’auteur du recueil poétique intitulé « Les Debouts », on sait malheureusement peu de chose, si ce n’est qu’il le fit paraître en 1902 à Bastia et le dédia à son chef de service « Monsieur Huard » en sa qualité de brigadier des douanes à Calvi. C’est grâce à Jean Clinquart, qui en fit une copie, qu’on peut aujourd’hui consulter ce recueil au Centre de Documentation Historique du Musée National des Douanes, ainsi qu’un article de presse paru lors de sa publication contenant les précisions suivantes :

“M. Jules-François Agostini, brigadier des douanes à Calvi (Corse), vient de faire paraître un charmant recueil de poésies qu’il a intitulé : Les Debouts !
Les Debouts ce sont les douaniers, et M. Agostini a passé en revue leur rude vie de luttes incessantes contre la fraude, au milieu de mille dangers, dans une série de pièces émouvantes :
Saisie inédite, Chanson douanière, Une vengeance, En embuscade, Incident de Mi-Carême, Double nez, Rapport de service, Franche lippée, Les Matelots, Entre Budgets, Les Cousins, Surprise, Le Contrebandier, Le Sifflet douanier, Les Engins, Le Douanier, Lucienne, De père en fils, Aveu douanier, Sur les quais, etc.
Nous ne saurions trop recommander à nos amis de lire cet intéressant recueil qui ne peut manquer de leur plaire.
Les Debouts forment une jolie brochure de 45 pages dont le prix, franco par la poste, est de 0 fr. 60 centimes (treizième en sus).
Adresser les lettres et mandats, avec adresses bien lisibles, à M. J. Agostini, brigadier des Douanes, quai du Port, à Calvi (Corse).”

 

Rapport de service (nuit de Noël)
(Les Debout), 1902*

 

“Le vingt-quatre Décembre à dix heures du soir,
Par une rude averse et par un temps très noir,
Près des vagues sans fin se livrant d’âpres luttes
Et brisant sur les bords leurs baveuses volutes,
De l’endroit dénommé l’Anfractuosité,
Point où notre service avait été porté,
Deux de nos Préposés Ohair et Gébéhesse
Perçurent tout à coup un long cri de détresse !
Bondissant hors du trou qui les tenait couverts
Dans l’ombre, à la faveur de rapides éclairs,
Ils purent distinguer touchant presque la rive
Un frêle esquif flottant dans cette alternative :
Etre en mille morceaux brisé sur les rochers,
Ou se voir happer par les flots empanachés !
Ecoutant seulement leur zèle et leur courage
Malgré l’obscurité, la mer grosse, l’orage,
Dédaignant le danger, décuplant chaque effort
Ils purent arracher quatre hommes à la mort …
Lorsqu’ils eurent tiré l’infime barque à terre
Et qu’ils en eurent fait le légal inventaire
Ils durent constater avec étonnement
Que l’on contrevenait à notre Règlement :
Tout l’arrière et l’avant, tout le sein de la cale
Etaient pleins de colis de soie et de Percale,
Nettement dépourvus de leurs formalités.
Les naufragés par eux furent tous arrêtés,
Ohair les a conduits à notre résidence,
Non sans avoir commis l’autre à la surveillance
De l’embarcation et des objets saisis.
Les délinquants qui sont arrivés tout transis
Ont reçu tous les soins dus par les lois humaines.
Je crois qu’à nos agents on payera leurs peines
Pour ce double bel acte assez original,
D’où le présent rapport, plus un procès-verbal.”

 


*Source :  Centre de Documentation Historique du Musée National des Douanes .